"

15 Lituanie

(Lou Andrysiak, Béatrice Langevin, Emmy Poitras)

Profil du pays

La Lituanie se situe sur la côte orientale de la mer Baltique. Il est le pays balte le plus peuplé et le plus étendu (Wikipédia, 2022). Du fait de sa proximité géographique avec la Lettonie, la Pologne, la Biélorussie et la Russie, la Lituanie est un pays ayant connu de nombreux régimes politiques, allant de pair avec de grands bouleversements sociaux et politiques. Au 13e siècle, pour lutter contre l’Ordre des chevaliers Teutoniques, les différentes tribus lituaniennes s’unissent les unes aux autres afin de former le Royaume de Lituanie. Cependant, c’est sous l’appellation de Grand-Duché de Lituanie que le pays s’étend, notamment en se liant avec la Pologne (ainsi que sa langue, sa culture et sa foi catholique). À ce moment précis, la Lituanie est au sommet de sa puissance, se propageant de la mer Baltique à la mer Noire. En 1579, la plus ancienne université d’Europe orientale, l’Université de Vilnius, y voit le jour. La Lituanie se sépare de la Pologne en 1795, seulement pour se retrouver sous l’emprise de l’Empire ottoman par la suite. Durant cette période, on assiste à une contrebande de livres particulièrement impressionnante. Les autorités tsaristes, voulant appliquer l’orthodoxie, répriment les documents de l’Église catholique, forçant la Lituanie à développer un marché du livre clandestin (ministère des Affaires étrangères de la République de Lituanie, 2018).

La Lituanie ne retrouvera son indépendance définitive qu’en 1990, faisant d’elle le premier pays soviétique à déclarer son indépendance (Wikipédia, 2022). En effet, étant géographiquement au cœur des conflits pendant les deux guerres mondiales, la Lituanie est envahie et occupée par l’Empire ottoman puis par l’URSS. Finalement, après la chute de cette dernière, le pays adhère à l’OTAN, puis à l’Union européenne (et à l’Euro) en 2004. La Lituanie est aujourd’hui une république parlementaire, qui dénombre bientôt plus de 3,5 millions d’habitant.es et dont la capitale est Vilnius. Sa langue officielle, le lituanien, allant de pair avec sa culture, sont des éléments fondateurs de sa survivance face aux multiples années d’occupation qu’elle a connues (Wikipédia, 2020). Au croisement de plusieurs cultures, histoires et mémoires, la Lituanie possède aujourd’hui un fort patrimoine culturel, religieux et touristique.

Histoire

L’histoire des bibliothèques en Lituanie débute au 16e siècle avec l’inauguration de la bibliothèque de l’Université de Vilnius en 1570. La collection est alors composée des livres de Sigismund II, roi de Hollande et Grand-Duc de Lituanie, ainsi que Georgius Albinius, suffragant de l’évêque de Vilnius. Les grands personnages politiques et religieux de l’époque ont aussi contribué à la collection par des dons de livres (UNESCO, 2022). Dès le 17e siècle, la collection de l’Université de Vilnius, qui était alors une académie, était l’une des collections les plus extensives d’Europe de l’Est. En 1775, on comptait 11 000 ouvrages à la bibliothèque. Le rôle de cette dernière a évolué au sein du pays et à l’international : depuis 1995, elle constitue un dépôt pour les Nations unies et de l’UNESCO. On estime que 5,3 millions de documents sont aujourd’hui conservés à la bibliothèque (Gudauskas, 1994).

Un événement qui a grandement influencé l’histoire des bibliothèques lituaniennes est l’interdiction de presse sanctionnée de 1864 à 1904. Les tsars, qui contrôlaient le territoire à l’époque, espéraient, avec cette censure sur le lituanien en alphabet latin, encourager la population à utiliser l’écriture cyrillique, afin de rendre le pays davantage russe. Bien sûr, une censure sur la publication influença nécessairement les bibliothèques, dont l’essor fut freiné. Durant ces années, on recense quelques bibliothèques opérant de façon secrète, mais la profession elle-même était en dormance. Des librairies ont aussi mis sur pied un marché noir de livres lituaniens, à travers lequel ils faisaient rentrer au pays des ouvrages écrits en alphabet latin publiés ailleurs. À la fin de la censure en 1904, les bibliothèques ont redoublé d’efforts pour rattraper le temps perdu. Durant cette période, on assiste au développement des théories sur la bibliothéconomie et des discussions sur les fonctions et collections des bibliothèques. La Lituanie obtient son indépendance de l’Empire russe en 1918 pour une brève période (jusqu’en 1940). À partir de ce moment, le pays se concentre à bâtir une culture nationale, qui inclut la remise sur pied des bibliothèques. Une association des bibliothécaires lituaniens (ALL) fut créée en 1931. En 1936, la Loi sur les bibliothèques publiques est passée et place ces dernières sous une direction/supervision gouvernementale. La même année, l’ALL devient membre de l’IFLA, mais les bibliothèques lituaniennes n’étaient pas au bout de leurs peines, puisque la période 1940-45 a été déclarée période de « bibliocide ». L’annexion de la Lituanie à l’URSS réintroduit la censure dans la culture nationale : les citoyen.nes devaient lire des ouvrages conformes aux exigences du Parti communiste. Les Soviets ont détruit des milliers de livres qu’ils jugeaient « inadéquats ». Tandis que les Allemands ont détruit quelque 3 millions de livres lituaniens. Les organismes éducatifs et culturels ont également été bannis, incluant l’ALL. Il y avait un réel objectif de détruire la culture lituanienne, auquel les bibliothèques n’ont pas pu échapper.

Ce n’est qu’après la fin de l’occupation soviétique que le pays peut faire un effort de réorganisation de son héritage culturel et social, qui s’organise en trois phases de reconstruction. D’abord, le gouvernement reconstruit plusieurs bibliothèques et établit, en 1960, un réseau des bibliothèques de Lituanie ayant pour objectif d’assurer une bonne répartition des bibliothèques à travers le territoire. La deuxième phase de la reconstruction s’articule de 1966 à 1967, elle sert à établir des districts distincts et à documenter la répartition géographique de la population. Finalement, la troisième phase, de 1976 à 1978, est le théâtre d’une unification des bibliothèques et de la désignation de la Bibliothèque nationale Martynas Mažvydas de Lituanie comme entité dirigeante du réseau. En 1991, on dénombre 44 réseaux de bibliothèques régionales et 5 systèmes concentrés dans les villes, qui ensemble représentent plus de 1700 bibliothèques. Le pays possède aussi un large réseau de bibliothèques scolaires et de recherche. Aujourd’hui, la bibliothèque de l’Université Vilnius contient 4,7 millions de volumes et demeure l’un des piliers du savoir en Lituanie (Gudauskas, 1994).

Types de bibliothèques

Le réseau des bibliothèques lituaniennes compte 2 549 bibliothèques (données de 2016). On peut les distinguer selon deux principaux critères. D’une part, leur fondation et leur titularité, on distingue les bibliothèques publiques et les bibliothèques privées. Les collections des premières sont la propriété de l’État et constituent la collection de la Lituanie, basée sur un système d’information standard et généralisé. D’autre part, on distingue les bibliothèques selon leur statut « général » ou « spécial ». Les premières répondent aux besoins d’information de tous les usager.ères qui sont citoyens d’un territoire donné, peu importe leur profession, niveau d’éducation, âge, contexte social ou culturel. Cette catégorie regroupe la bibliothèque nationale, les bibliothèques publiques de comté (county public libraires) et les bibliothèques publiques municipales (municipal public libraries). Quant aux secondes, elles répondent aux besoins spéciaux de certaines communautés en élaborant des collections spécialisées et adaptées à ceux-ci (éducationnels, de recherche, manufacturiers, etc.). Cette catégorie regroupe les bibliothèques gouvernementales spécialisées qui servent des secteurs spécifiques, comme la médecine ou l’agriculture ; les bibliothèques des institutions de recherche ; les bibliothèques académiques des établissements d’éducation supérieure ; les bibliothèques scolaires ; et les bibliothèques des autres institutions et organisations, comme les hôpitaux, les prisons et des sociétés corporatives (Macevičiūtė, 2015, p. 3495).

L’apprentissage public est la première mission stratégique des bibliothèques de Lituanie. Elles visent à renforcer les compétences culturelles et informationnelles et les activités de développement de l’alphabétisation des citoyen.nes. Pour ce faire, elles doivent promouvoir la créativité, l’activité sociale et économique des membres de la société; et les motiver à participer au processus d’apprentissage continu tout au long de la vie (ministère de la Culture de la République de Lituanie, 2016). La Lituanie dispose également du LIBIS (Lithuanian integrated Library information system) qui permet d’automatiser les principaux procédés en bibliothèque. Cela comprend les procédés d’acquisition, de catalogage et de mise en circulation; les services en ligne pour l’enregistrement des usager.ères jusqu’à la réception de leur document ou e-service; le service automatisé de prêts et retours et un logiciel spécialisé pour la lecture de livres électroniques ou sur liseuses (Digital-Lithuania, 2019).

Le gouvernement a déterminé cinq établissements ayant des collections riches en valeur et leur a attribué le statut de « bibliothèques d’importance nationale ». Elles servent de centre de consultation pour les autres bibliothèques de leur réseau et ont leur propre ligne dans le budget national du gouvernement pour le financement de la Bibliothèque Nationale et des bibliothèques d’importance nationale. La Bibliothèque de l’Université de Vilnius est l’exception à cette catégorie. Ces cinq bibliothèques sont également désignées comme dépôt légal de copies de documents (Macevičiūtė, 2015, p. 3496).

À la tête du vaste réseau de bibliothèques lituaniennes se trouvent trois organes : le ministère de la Culture, le ministère de l’Éducation et des Sciences et le Conseil des bibliothèques. Ce dernier est un organe consultatif qui aide les ministères et l’État à formuler, définir et établir: la stratégie de développement des bibliothèques, les principes de financement de celles-ci et les besoins dans les domaines de la bibliothéconomie scolaire et scientifique. Le conseil est composé de 11 membres qui sont choisis par la communauté des bibliothécaires et le ministère de la Culture (Macevičiūtė, 2015, p. 3496). La typologie des bibliothèques lituaniennes, énoncée sommairement ci-dessus, se distingue en dix types de bibliothèques qui se répartissent également sous les deux ministères.

Bibliothèque nationale de Lituanie

La Bibliothèque nationale Martynas Mažvydas de Lituanie (NLL) est la principale bibliothèque publique et de recherche du pays, et ce depuis le 30 mai 1989, selon la loi sur les Bibliothèques (Macevičiūtė, 2015, p. 3496). Cependant, elle existe depuis 1919, lorsque le Commissariat de l’Éducation créa la Bibliothèque centrale de Lituanie (Martynas Mažvydas National Library of Lithuania, 2022). Elle remplit toutes les fonctions d’une bibliothèque nationale. D’abord, elle sert de bibliothèque parlementaire depuis 1991. Ensuite, elle agit comme centre des sciences sociales et humaines, comme centre d’attribution des ISBN, ISMN et ISSN, et comme système d’information intégré des bibliothèques de Lituanie (LIBIS). D’autre part, elle est le centre national de bibliographie et de publication des statistiques, en plus de servir de centre de coordination, de consultation et de recherche sur les méthodes de bibliothéconomie. Finalement, comme vue précédemment, elle sert de dépôt institutionnel national pour les archives de toutes les publications. Elle s’assure de la préservation du patrimoine imprimé lituanien et du Lituanica, soit les publications à l’étranger qui traitent de la Lituanie ou qui sont des publications de lituanien.nes (Macevičiūtė, 2015, p. 3496). La NLL a pour vision de devenir partie intégrante du progrès de son pays dans les sphères de la politique informationnelle, culturelle, éducative, scientifique et économique. Ses priorités sont de diffuser l’héritage culturel et supporter la diversité dans le contenu et les services culturels ; de développer des produits et services d’information ; d’améliorer les conditions légales et technologiques pour l’accès à l’information; et d’aider au développement de la recherche fondamentale et appliquée dans le domaine des sciences de l’information et de la communication (Martynas Martynas Mažvydas National Library of Lithuania, 2021).

Bibliothèque pour les aveugles

La bibliothèque pour les aveugles de Lituanie (Lietuvos aklųjų biblioteka—LAB) a un statut spécial, en tant que bibliothèque publique générale qui répond aux besoins informationnels et culturels des personnes qui ne sont pas en mesure de lire des textes imprimés normaux. Elle publie également des livres audio et du matériel et des périodiques en braille et autres méthodes d’imprimé spéciales. Elle possède également des publications avec des images tactiles pour les enfants. En offrant ses services, la LAB permet aux personnes, qui ne peuvent utiliser les livres et autres supports d’information traditionnels, de se divertir et d’apprendre en ayant accès aux informations essentielles pour le travail, les études, les loisirs et la lecture pour le plaisir. En plus de sa bibliothèque centrale située à Vilnius, la LAB possède cinq branches dans différentes villes du pays : Kaunas, Klaipėda, Panevėžys, Šiauliai, and Ukmergė (Lithuanian Library for the Blind, 2018).

Bibliothèques publiques

Le réseau des bibliothèques publiques de Lituanie est le deuxième en importance au pays, mais celui qui rejoint le plus grand public (Macevičiūtė, 2015, p. 3497). Ce réseau est composé des cinq bibliothèques de comté : la Bibliothèque publique Adomas Mickevičius du comté de Vilnius, la Bibliothèque publique du comté de Kaunas, la Bibliothèque publique Simonaitytè du comté de Klapėda, la Bibliothèque publique Povilas Višinskis du comté Šiauliai et la Bibliothèque publique Gabrielė Petkevičaitė-Bitė du comté de Panevėžys (Ministry of culture of the Republic of Lithuania, 2021). En plus des 60 bibliothèques publiques centrales auxquelles sont rattachées 136 branches de bibliothèques publiques urbaines, 12 branches de bibliothèque publique jeunesse, 1059 branches de bibliothèques publiques rurales, celles-ci incluent les branches de bibliothèques publiques qui sont intégrées aux bibliothèques scolaires. Ce réseau totalise 1267 bibliothèques publiques municipales (Martynas Mažvydas National Library of Lithuania, 2015). Les bibliothèques publiques sont directement impliquées dans la vie de leurs communautés. Cette implication démontre l’attitude générale du pays envers les bibliothèques et assure que la prochaine génération d’utilisateur.trices ait accès à la bibliothèque et s’y rend (Macevičiūtė, 2015, p. 3499). Les bibliothèques publiques ont pour mission d’assurer aux citoyen.nes la possibilité d’acquérir le savoir et les qualifications qui leur permettent de s’adapter rapidement aux conditions changeantes de la vie et du travail; afin de pouvoir rivaliser efficacement dans les marchés mondiaux. Elles ont également pour mission d’éliminer les inégalités dans les infrastructures de l’information des villes et provinces; en plus de fournir des conditions équitables d’utilisation des technologies de l’information aux habitant.es, et ce pour tous les besoins publics et sociaux. Finalement, elles ont pour mission de créer les conditions nécessaires pour collecter, préserver et diffuser au public les objets ayant un héritage de valeur nationale, culturelle et scientifique; et d’assurer l’accès aux collections des bibliothèques (Macevičiūtė, 2015, p. 3498).

Bibliothèques spécialisées

Certaines catégories de bibliothèques publiques sont classées comme des bibliothèques spécialisées ; elles ont des responsabilités spécialisées dans un domaine en particulier. On retrouve dans ce groupe de bibliothèque le réseau des bibliothèques techniques, dont la Bibliothèque Technique de Lituanie; les réseaux des bibliothèques de médecine et des institutions de la santé, dont la Bibliothèque de Médecine de Lituanie; et le réseau des bibliothèques d’agriculture et des instituts de recherche d’agriculture, dont la Bibliothèque d’Agriculture de Lituanie (Martynas Mažvydas National Library of Lithuania, 2015). Cette catégorie comprend également les bibliothèques des musées et autres institutions de la culture. La bibliothèque technique de Lituanie est une des plus importantes du pays avec plus de 52 000 000 documents. Sa collection est d’une grande importance pour les industries et le domaine de la recherche. C’est la première bibliothèque à avoir créé un centre d’information d’affaires en 1992 (Macevičiūtė, 2015, p. 3498).

Bibliothèques académiques

On compte dans cette catégorie 41 bibliothèques académiques, soit 19 universitaires (14 publiques et 5 non publiques) et 22 collégiales (13 publiques et 9 non publiques) (Martynas Mažvydas National Library of Lithuania, 2015). On compte également les bibliothèques des institutions de recherche, dont la bibliothèque de l’Académie des sciences de Lituanie et la bibliothèque des sciences et technologies militaires de la Jonas Žemaitis Military Academy of Lithuania. Malgré la petite taille de ce réseau, ces bibliothèques sont parmi celles qui sont les plus actives dans le développement et l’avancement de la bibliothéconomie selon les pratiques modernes en Lituanie. La bibliothèque académique électronique de Lituanie (eLABa) est un dépôt national agrégé en libre accès créé en 2006. Son but est de développer un environnement et les outils nécessaires pour la préparation, la collecte et la préservation à long terme des recherches et études en e-document pour en favoriser l’accès (eLABa, 2022).

Bibliothèque des institutions éducatives

Ce réseau compte 1110 bibliothèques d’institutions éducationnelles. Parmi celles-ci figurent les 1033 bibliothèques des écoles d’éducation générale, soit 103 bibliothèques de gymnases professionnels, 370 bibliothèques de gymnases, 116 bibliothèques scolaires primaires, 415 bibliothèques scolaires de base et 29 bibliothèques scolaires secondaires. On compte également 70 bibliothèques d’établissements d’enseignement professionnel (Martynas Mažvydas National Library of Lithuania, 2015). L’éducation est obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans et dispensée selon le format K-12 (niveaux 1 à 10). Tout au long du cheminement scolaire, l’éducation peut être donnée par différentes institutions : les écoles de base, les gymnases (niveaux 9 à 12), les pré-gymnases (niveaux 1 à 8) ou d’autres institutions, formelles ou informelles, d’éducation, de culture ou de services sociaux (Marquardt et Aidulyte, 2022). Les bibliothèques sont obligatoires dans les établissements scolaires selon la loi. Ainsi, elles font partie intégrante de l’école et contribuent à la réalisation de plusieurs activités et soutiennent les besoins informationnels des étudiant.es (Marquardt et Aidulyte, 2022).

Cadre éducatif en sciences de l’information et des bibliothèques

Il existe en Lituanie des programmes d’éducation et de recherche en sciences de l’information. Le plus gros centre se situe à l’Université de Vilnius, et était originalement inclus dans le département des communications. Comme toutes les autres institutions culturelles et d’information, le département a longuement cessé ses activités en raison des perturbations sociopolitiques sévissant dans le pays (Routledge, 2017). C’est en 1940 qu’ouvre finalement un département axé sur les sciences de l’information, dirigé par Vaclovas Biržiška ; puis en 1945, on crée le programme de baccalauréat en bibliothéconomie à l’Université de Vilnius. À l’époque, c’est le seul programme d’études supérieures en communications et sciences de l’information en Lituanie. Depuis 1991, ce programme a vu 35 diplômé.es, dont 30 ont élaboré une thèse sur un sujet dans les sciences de l’information (Routledge, 2017).

Depuis 2001, l’Université de Klaipeda offre également une formation en bibliothéconomie dans sa faculté des sciences sociales. Ce programme a été établi spécifiquement pour répondre au manque de bibliothécaires ressenti dans la partie nord-ouest du pays, surtout dans les bibliothèques scolaires (Routledge, 2017). Il est important de noter que les bibliothèques ont encore un manque de main-d’œuvre professionnelle important ; le nombre de diplômé.es en bibliothéconomie continue de diminuer, puisque les jeunes bibliothécaires ne sont pas attirés par le milieu scolaire en raison du salaire et de l’environnement de travail. Le développement professionnel des bibliothèques est pris en charge par le Centre lituanien pour le développement professionnel des employé.es en milieu culturel, qui organise des formations et séminaires pour les bibliothécaires (Routledge, 2017).

Parallèlement, la faculté des sciences de l’information de Vilnius prend aussi en charge la publication de deux revues scientifiques sur les sciences de l’information : Knygotyra (depuis 1961) et Informacijos mokslai (depuis 1991). Au départ, il n’y avait qu’une revue (Knygotyra), mais les professionnel.les ont pris la décision de la diviser en deux publications distinctes. Chacune se concentre sur un aspect majeur des sciences de l’information : les sciences humaines et sciences sociales. La Bibliothèque nationale de Lituanie participe également à la recherche dans le domaine. Elle surveille le développement des bibliothèques en Lituanie et dirige de nombreux projets de recherche, dont des études sur la lecture (Routledge, 2017).

Association de bibliothèques

L’Association des bibliothécaires lituaniens (Lietuvos bibliotekininkų draugija), établie en 1931, fait preuve d’une implication est très importante dans le développement d’une ligne directrice propice à la bibliothéconomie lituanienne. L’objectif principal de l’association est la promotion du rôle primordial des bibliothèques dans la société, tout en assurant que ses employé.es possèdent des qualifications professionnelles de qualité.

L’association possède évidemment un code de déontologie similaire aux recommandations internationales indiquées par l’IFLA. La Lituanie désire perpétuer sa démocratie au sein de ses bibliothèques, afin d’assurer « la continuité de la culture et du savoir dans la société » (Lietuvos bibliotekininkų draugija), entre autres, en garantissant la liberté d’expression et la liberté d’apprendre dans un cadre équitable et sécuritaire. Ces prises de décisions et ces directions nationales ont permis de rendre le système des bibliothèques lituaniennes particulièrement performant.

D’autres associations travaillent main dans la main avec le réseau des bibliothèques lituaniennes. Selon le ministère de la Culture du pays, il n’y aurait pas moins de 5 associations publiques œuvrant actuellement sur le terrain. En dehors de l’Association des bibliothécaires lituaniens citée plus haut, la période 1997 à 2001 est témoin d’un apport crucial pour le monde associatif du pays. En 1997, l’Association des directions des bibliothèques universitaires voit le jour. Un an plus tard, c’est au tour de l’Association des bibliothèques publiques des comtés de Lituanie, puis à l’Association des bibliothèques municipales de Lituanie. Enfin, en 2001, on assiste à la création du Consortium des bibliothèques de recherche lituaniennes (ministère de la Culture de la République de Lituanie, 2021).

En addition, plusieurs associations et organisations internationales de bibliothèques œuvrent aussi sur et avec le réseau lituanien, pour mener tant des politiques globalisantes que des partenariats avec les bibliothèques du pays. L’EIFL (Electronic Information for Librairies) est un bon exemple d’une organisation internationale dont les actions s’appliquent à la Lituanie, et cela depuis plus de 20 ans. Les ententes entre l’EIFL et les organisations domestiques permettent d’apporter au réseau bibliothéconomique du pays « un grand nombre de e-ressources scolaires » (EIFL, s. d.) notamment au travers de plateformes de documents en accès libre. L’EIFL oeuvre sur un large réseau de bibliothèques dans le pays, aussi bien dans le domaine universitaire, que national ou municipal. Cela permet de créer une connaissance commune et démystifiée sur le libre accès et ses composantes inhérentes, afin d’aider au mieux les utilisateurs.rices et conséquemment la société (EIFL, s. d.).

Les partenariats entre les pays ont donné lieu à des regroupements de gouvernements pour le développement et la réalisation de projets communs. La présence de la Lituanie au sein de l’Union européenne lui permet notamment de travailler conjointement avec l’ensemble des pays partageant les mêmes fonds économiques. En 1997, on observe la création du Réseau des bibliothèques académiques de Lituanie. La vision d’une structuration en réseau, consolidée par les recommandations et le soutien international, permet d’importants avantages ; tels que l’accumulation de ressources et de connaissances, ainsi qu’une mise à disposition efficace de celles-ci pour tou.tes les usager.ères (Lithuania: Libraries and Librarianship). D’autres partenariats existent entre les universités européennes ou encore entre les bibliothèques nationales et de plus grandes instances. L’implication de la Lituanie dans l’Union européenne et à l’international se réalise à plusieurs échelles. La Bibliothèque nationale Martynas Mažvydas de Lituanie fait partie de plusieurs consortiums : IFLA, Bibliothèque Européenne (TEL) ou encore le Conseil international du livre jeunesse (IBBY) (LBD, s. d.). Toutes ces implications et relations permettent une intégration notable et une participation active de premier plan des réseaux de bibliothèques lituaniens dans les perspectives tant régionales, que nationales et mondiales.

Cadre législatif

La construction d’une société d’information

Comme vu précédemment, c’est à partir de sa seconde ère d’indépendance que la Lituanie a pu développer sa société d’information. On dénote un intérêt fort en ce sens dès 1992. En 2002, le gouvernement lithuanien établit le Comité de développement de la société d’information. Il est responsable d’implémenter et de développer les technologies d’information et de communication. Il doit également s’assurer que les différents groupes sociaux aient un accès égal à ces infrastructures de l’information, et ce, entre autres, à travers le développement des compétences requises. Ce comité est également chargé d’élargir les services du e-gouvernement et d’assurer le progrès de la e-démocratie, soit la présence du gouvernement sur Internet et l’exercice de la démocratie sur ce dernier (Macevičiūtė, 2015, p. 3494).

Les fondations légales du système de bibliothèques lithuanien

La Constitution de la République de Lituanie établit les fondations légales de l’accès à l’information et des institutions chargées d’assurer sa préservation sous ses différentes formes (Macevičiūtė, 2015, p. 3494). L’Article 25 garantit que les individus ne doivent pas être empêchés de chercher, recevoir et transmettre de l’information et des idées. L’Article 42 oblige l’État à supporter la culture et la science, ainsi que d’assurer la protection du patrimoine historique, artistique et culturel lithuanien, et tout autre objet de valeur (Macevičiūtė, 2015, p. 3494).

D’autres lois influencent également les services d’information et les bibliothèques. D’abord, le droit de recevoir de l’information et de s’exprimer est principalement couvert par la Loi sur les dispositions de l’information au public (Macevičiūtė, 2015, p. 3494-3495). En second, la régulation de la préservation de l’héritage culturel et la création ou la diffusion d’information et de produits est assurée par les lois suivantes : la Loi sur les bibliothèques, la Loi sur les documents et archives, la Loi sur les musées. Ensuite, certains aspects des activités informationnelles sont régulés par les lois suivantes : la Loi sur la propriété intellectuelle et autres droits relatifs, la Loi sur la protection légale des données personnelles, la Loi sur le droit d’obtenir de l’information de l’État, des institutions municipales et autres (Macevičiūtė, 2015, p. 3495). D’autre part, le développement rapide des technologies de diffusion, d’information et de communication a poussé l’État à réguler ces nouvelles activités et leurs relations. Ces lois s’appliquent aux bibliothèques puisqu’elles sont des fournisseuses de services Internet, des créatrices d’information numérique et des médiatrices d’accès aux produits créés par les fournisseurs tiers commerciaux et publics. Parmi celles-ci on compte la Loi sur les sociétés de services d’information, la Loi sur les communications électroniques et la Loi sur la signature électronique (Macevičiūtė, 2015, p. 3495).

C’est la Loi sur les bibliothèques, adoptée en 1995 et révisée en juin 2004, qui a jeté les bases du système des bibliothèques lituaniennes. Elle couvre les relations entre les bibliothèques, les règles d’établissement, de financement, d’administration, de gestion, construction et structuration des collections, ainsi que les principes de services. Selon cette loi, les imprimés et toute autre forme de documentation doit être accessible à tous, sans frais et sans égard à leur qualité d’auteur.trice ou leur orientation politique et idéologique. La bibliothèque assure cette accessibilité en sa qualité d’institution de la culture, d’éducation et d’information (Macevičiūtė, 2015, p. 3495). D’autres lois et actes législatifs viennent supporter et renforcer ce rôle des bibliothèques, comme la Loi sur la propriété intellectuelle et autres droits relatifs. Celle-ci assure le droit des bibliothèques, à visée éducationnelle ou scientifique sans rémunération, de prêter des ouvrages soumis aux droits de la propriété intellectuelle et d’auteur ; et assure leur droit de les reproduire à des fins de préservation et pour les besoins personnels des usager.ères. Cette loi permet aussi de définir l’utilisation et la reproduction de documents numériques dans les bibliothèques. Elle régule également, jusqu’à un certain point, l’usage et la titularité des droits sur les bases de données créées par les bibliothèques (Macevičiūtė, 2015, p. 3495).

Information complémentaire/particularités

L’année 2022 témoigne de la célébration et de la reconnaissance de l’impact considérable des bibliothèques sur le domaine de la recherche, notamment avec l’aide des bibliothèques universitaires. Les cinq dernières années sont marquées par une croissance et un développement impressionnant, allant de pair avec l’ancienneté des universités du pays (notamment l’Université de Vilnius qui va bientôt fêter ses 450 ans) (Elsevier, s. d.).

Il y a une corrélation entre cette croissance particulière et les nombreuses compétences informationnelles que les réseaux de bibliothèques ont mises en place. Que ce soit en travaillant avec des organisations internationales (tel que L’EIFL cité plus haut) ou simplement entre les différentes bibliothèques du pays, celles-ci ont pu s’adapter aux nouveaux besoins informationnels de notre époque. Un exemple de cas probant serait celui de l’Université de Vilnius, qui offre des Fab Labs et de nombreuses ressources informatiques pour accompagner les étudiant.es dans leurs recherches. Cela permet de donner accès à du matériel coûteux, qu’iels ne pourraient se permettre. En plus d’un libre accès à une quantité très conséquente de métadonnées et de bases de données performantes, provenant aussi bien de leur université, que de celles appartenant au réseau (Vilnius Gediminas Technical University, s. d.).

Bibliographie

EIFL. (s. d.). Lituanie. Consulté 14 décembre 2022, à l’adresse https://www.eifl.net/country/lithuania

eLABa. (2022). About eLABa—ELABa. ELABa Lithuanian Academic Electronic Library. https://www.elaba.lt/elaba-portal/en/pradzia

Elsevier. (s. d.). Towards Future Research Impact in Lithuania. https://www.elsevier.com/en-xm/events/towards-future-research-impact-in-lithuania

Gudauskas, R. (1994). Lithuanian Library History. The International Information & Library Review, 26(4), 271-287. https://doi.org/10.1006/iilr.1994.1019

LBD. (s. d.). Įstatai. Consulté 14 décembre 2022, à l’adresse https://www.lbd.lt/istatai/

Lithuanian Library for the Blind. (2018). About | Lithuanian library for the blind. About | Lithuanian Library for the Blind. https://www.labiblioteka.lt/en/about/31

Lithuanian Integrated Library Information System. (s. d.). Digital-Lithuania. Consulté 9 novembre 2022, à l’adresse https://digital-lithuania.eu/project/lithuanian-integrated-library-information-system/

Lituanie. (2022, 14 décembre). Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/Lituanie

Marquardt, L., & Aidulyte, J. (2022). School Libraries and Information Literacy Education in Lithuania : State-of-Art and Survey Findings. IASL Annual Conference Proceedings. https://doi.org/10.29173/iasl8528

Macevičiūtė, E. (2017). Lithuania. Routledge Handbooks Online. https://doi.org/10.1081/E-ELIS4-120043556

Martynas Mažvydas National Library of Lithuania. (2015). Martynas Mažvydas National Library of Lithuania General 2015 Library Report. https://lrkm.lrv.lt/uploads/lrkm/documents/files/EN_2015_Library_Statistics.pdf

Martynas Mažvydas National Library of Lithuania. (2022). History—Martynas Mažvydas National Library of Lithuania. Martynas Mažvydas National Library of Lithuania. https://www.lnb.lt/en/about-library/main-information/history

Martynas Martynas Mažvydas National Library of Lithuania. (2021). Strategic vision and priorities of the National library of Lithuania, 2021-2023. https://www.lnb.lt/en/about-library/main-information/about

Ministère des Affaires étrangères de la République de Lituanie. (2015, 09 octobre). Histoire. https://www.urm.lt/default/fr/bienvenue-en-lituanie/sur-la-lituanie/histoire

Ministry of culture of the Republic of Lithuania. (2021, 02). Libraries [Gouvernement]. Ministry of culture of the Republic of Lithuania. https://lrkm.lrv.lt/en/activities/libraries

Portail de la Lituanie. (2020, 20 octobre). Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/Portail:Lituanie

République de Lituanie. (2021, janvier 1). I-920 Loi sur les bibliothèques de la République de Lituanie [Gouvernemental]. Registre des actes de droit. https://www.e-tar.lt/portal/fr/legalAct/TAR.5A04D7CC7EF6/UcLZpZWqIa

UNESCO (s.d.) Lithuania—Historical Collections of the Vilnius University Library. Consulté 8 décembre 2022, à l’adresse https://www.unesco.org/en/articles/lithuania-historical-collections-vilnius-university-library

Vilnius Gediminas Technical University (s. d.). Vilnius Tech. https://vilniustech.lt/

Licence

Symbole de License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International

Bibliothèques à l'international : un manuel ouvert. Tome 3 Droit d'auteur © 2022 par Adèle Couture; Ana Catalina Alvarado; Anabelle Vacher; Andréa Casciano; Andréanne Bessette; Annie Paquin; Annie das Cadeias; Annie-Claude Duchesne-Perron; Amel Goussem Mesrati; Amélie Rocheleau; Amélie Rols; Ariane Sanchez; Arianne Bouchard-Fauteux; Armelle Christin; Béatrice Langevin; Bernus Amoussouga; Caroline Blais; Cassandra Tardif; Catherine Moreault; Charles-André Blain; Charlotte Lachance; Colette Leduc; Delphine Cado; Elisabeth Genest; Emilie Tron; Éric Le Ray; Erika Paquette-Lauzon; Eva Yakauchuk; Emmy Poitras; Fany Alvarado; Fatima Zelazel; Fatma Doumbia; Faye Daw-Yi Fung; Florian Alatorre; François Duquette; François Saintonge; Frédéric St-Sauveur; Ganaëlle Roberge; Geneviève Larocque; Josiane Ferron; Karine Massé; Lamia Boumsied; Laura Simard-Lemaire; Laurence Martin; Léa Rose Tremblay; Lou Andrysiak; Louise-Marie Picard; Marianne Giroux; Marielle Roy; Maxime Laprade; Mathieu Sirois; Mélanie Beaulieu; Mylène Chouinard; Mylène Lalonde; Monique Bernal; Nicolas Des Groseillers; Olivia Valentini; Ronel Kevin Attigbe; Roselyne Gendron; Sabrina Mac Gregor; Sarah B.; Sergio Estrada; Shadi Abdoli; Sophia Ouhnana; Thibaut Thierry; Thomas Sieber; Valérie Grégoire; Vladimir Lorcencov; Viviane St-Arnaud; et Charles-Antoine West est sous licence License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

Partagez ce livre