11 Palestine
(Xigetu He, Hind Fathallah, Mathieu Préfontaine, Jacynthe N. Bigras, Nathanaël Roussy)
Profil du pays
La Palestine est une région située sur la côte orientale de la mer Méditerranée circonscrite de diverses manières en fonction du contexte géographique, politique ou historique dans lequel elle est mentionnée et qui, jusqu’à plusieurs années après le mandat britannique de 1923, comprenait l’Israël contemporain, la Cisjordanie et la bande de Gaza (Albright et al., 2023; Masalha, 2018). Ce territoire contesté est bordé au nord par le Liban, à l’est par la Syrie et la Jordanie et au sud-ouest par l’Égypte. Les frontières de l’État de Palestine, reconnu par 136 États, dont l’ONU en tant qu’État observateur non-membre, ont été négociées lors de la signature de l’accord d’Oslo en 1993 et sont composées des zones A et B de la Cisjordanie et de la bande de Gaza (Nations Unies, 2023).
Il existe en cela deux administrations distinctes sur les territoires palestiniens occupés. L’Autorité nationale palestinienne administre les habitant·es arabes dans ces deux zones de la Cisjordanie, représentant 30 % de la superficie du territoire de Palestine tel que défini dans les accords intérimaires sur la Cisjordanie et la bande de Gaza de 1995. La zone C, qui couvre le reste du territoire de la Cisjordanie, est entièrement sous contrôle israélien. La bande de Gaza, quant à elle, est gouvernée par le mouvement de résistance islamique, ou Hamas, qu’il administre seul sur le territoire depuis juin 2007.
La bande de Gaza a une superficie totale de 360 km2 et une population estimée à 2 098 389 habitants dont 77,6 % se rassemblent en milieu urbain, en faisant l’une des régions les plus densément peuplées au monde (The World Factbook, 2023). La population de Gaza est particulièrement jeune, l’âge médian étant de 18 ans. La Cisjordanie a pour sa part une superficie totale de 5860 km2 et une population estimée à 3 176 549 habitants dont environ 468 300 colons israéliens. Dans les deux cas, la langue officielle est l’arabe, mais on y parle aussi l’hébreu, particulièrement la population israélienne, bien que la population arabe le parle également couramment, et l’anglais. Si la population de la bande de Gaza est presque exclusivement de confession musulmane, à près de 99 %, la situation est plus partagée en Cisjordanie, pour cause d’une présence israélienne plus marquée. L’appartenance religieuse y est donc entre 80 et 85 % musulmane et entre 12 et 14 % juive, avec une faible présence de croyance chrétienne (The World Factbook, 2023). Quant à Jérusalem-Est, annexée par Israël en 1967 mais dont les revendications territoriales demeurent fortement contestées, une population majoritairement arabe, à 61 % pour 370 500 habitants, y était encore installée en 2021. La population restante est de confession juive et représente 236 600 habitants, soit 39 % de sa population (Jerusalem Institute for Policy Research, 2023). Économiquement vulnérables, les territoires palestiniens occupés souffrent de blocus, d’une perte continue de terres et de ressources naturelles au profit des colonies israéliennes, d’une pauvreté endémique, d’une réduction de l’espace budgétaire, d’une diminution de l’aide internationale et d’une accumulation de dettes publiques et privées. Cette dépendance économique forcée par l’occupation conduit 80% de la population palestinienne à compter sur l’aide internationale (Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement [CNUCED], 2023).
Histoire
La région de la Palestine a été l’une des premières au monde à connaître l’habitation humaine, les communautés agricoles, la civilisation matérielle, puis une urbanisation sophistiquée au début de l’âge du bronze (Masalha, 2018). Bien que le terme géopolitique « Palestine » puisse être retrouvé jusqu’à la fin de l’âge du bronze et aux Philistins autochtones, la consolidation du concept de la Palestine peut être attribuée à Hérodote et à d’autres historiens, ethnographes et géographes grecs de l’Antiquité classique (Masalha, 2018). En cela, la Palestine ne formait, pendant des siècles, aucune unité politique ou géographique indépendante, son nom, ses frontières et ses civilisations, qu’elles soient cananéennes, philistines ou judéennes, changeant à travers les années (Krämer, 2008). Elle est intégrée à l’Empire ottoman au XVIe siècle où elle connaît une période de relative stabilité et peut faire l’expérience d’une diversité culturelle et religieuse. La chute de l’Empire ottoman à la fin de la Première Guerre mondiale facilite le passage de la Palestine sous le mandat britannique (Masalha, 2018).
Depuis maintenant plus de cent ans, l’histoire de la Palestine est intrinsèquement liée avec le développement de l’État israélien. La Déclaration de Balfour de 1917 marque les premiers pas du mandat britannique dans la région et de la reconnaissance internationale du mouvement sioniste en déclarant envisager favorablement « l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif » (Nations Unies, 2023). En 1948, l’État juif déclare son indépendance sous le nom d’Israël à la suite d’un plan de partition proposé par l’ONU et prend le contrôle de plus de 77% du territoire de la Palestine, un événement qui, pour la population palestinienne, signifie l’exil de plus de 700 000 habitants. Cet événement sera appelé la Nakba, qui signifie «catastrophe » ou « désastre » (Nations Unies, 2023; Hamad, 2021). La guerre des Six Jours de 1967 entraine un second exode palestinien et l’occupation des territoires palestiniens restants. Les hostilités entre les colons et la population autochtone entraînent par la suite ponctuellement des excès de violence coloniale et des soulèvements palestiniens, sous la forme notamment de deux Intifadas (1987-1993 et 2000), autour desquelles s’organisent des négociations de paix qui peinent à apaiser les tensions régionales. Au cours de ces années, le contrôle rigide des frontières et de la mobilité palestinienne, les expulsions et les démolitions de maisons, le refus du droit au retour des réfugiés et l’établissement continu de nouvelles colonies pointent tous vers un processus d’annexation qui se poursuit encore aujourd’hui dans les conflits ayant éclatés en octobre 2023, menant à une nouvelle invasion israélienne de la bande de Gaza.
Historiquement, la Palestine fut part d’une civilisation arabe et islamique dans laquelle les bibliothèques prenaient une place d’importance et la période du règne ottoman entraîne de grands changements au cours desquels de multiples bibliothèques sont fondées. L’occupation britannique, à partir de 1917, entraine la limitation des investissements dans ces milieux et voit les Palestinien·nes arabes être banni·es, jusqu’à 1948, des bibliothèques publiques administrées par le gouvernement britannique (Hamad, 2021). Si les Palestinien·nes s’adaptent en établissant plusieurs bibliothèques privées, la Nakba accélère cette dépossession lorsqu’environ 30,000 livres sont appropriés des territoires nouvellement conquis (Amit, 2011). La plupart de ces ouvrages sont encore accessibles à la bibliothèque nationale d’Israël. L’occupation par Israël, en 1967, des territoires palestiniens restants, soit Jérusalem, la Cisjordanie et la bande de Gaza entraîne une série de prohibitions et de régulations qui facilitent la censure, la confiscation et la restriction de la circulation des ouvrages et font obstacle au développement de la vie culturelle de la population colonisée (Hamad, 2021). (Pour plus de détails, voir les sections Obstacles et défis pour les bibliothèques en Palestine ainsi que Cadre législatif).
Afin de mieux cerner le contexte dans lequel naviguent les bibliothèques de Palestine, il semble essentiel de lier le bref survol historique ci-haut avec le concept de colonialisme de peuplement théorisé par Patrick Wolfe et son application dans le contexte israélo-palestinien. En tant que structure, plutôt qu’événement ponctuel, cette articulation du colonialisme se base principalement sur l’élimination de la population autochtone, au-delà de son exploitation, en ce que l’objectif est avant tout celui de l’établissement durable et exclusif de colons provenant de la métropole (Wolfe, 1999). La structure de l’occupation israélienne facilite, de 1917 à aujourd’hui, la dépossession des communautés palestiniennes et se pose comme un défi majeur au développement des bibliothèques en Palestine.
L’escalade récente de la colonisation israélienne à la suite de l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 accélère de manière fulgurante la destruction de la bande de Gaza, précipitant, en date de décembre 2023, la mort de plus de 20 000 Palestinien·nes (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs [OCHA], 2023), dont 8500 enfants, un nombre qui dépasse largement la sévérité de ces décès dans les dernières années par rapport à d’autres zones de conflit (Save the Children, 2023). La dévastation de Gaza est telle qu’elle pousse plusieurs expert·es et acteur·ices politiques important·es à faire remonter sur la scène internationale la question de génocide (Adel et Gallagher, 2023). Si Reuters rapportait le 12 décembre qu’environ 18 % de l’ensemble des bâtiments ont été endommagés ou détruits depuis le début de cette escalade, cela représente des conséquences majeures sur l’intégrité et le fonctionnement des bibliothèques et des centres d’archives de la région.
Types de bibliothèques
L’occupation en Palestine joue un rôle majeur, à divers égards, sur la situation des bibliothèques. Dresser une liste ou faire la typologie des bibliothèques existantes ne saurait suffire à dépeindre un portrait adéquat, c’est pourquoi nous présenterons aussi, dans un deuxième temps, les obstacles spécifiques aux bibliothèques palestiniennes. Cependant, la situation évoluant très rapidement et les sources d’information étant limitées, nous ne saurions brosser un portrait exhaustif ni totalement actuel de la situation. Par ailleurs, plusieurs institutions culturelles ont été détruites ou endommagées par l’armée israélienne dans l’offensive qui a cours depuis le 7 octobre, sous prétexte qu’elles abriteraient des membres du Hamas, et en dépit de la loi internationale qui reconnaît les institutions culturelles comme des infrastructures civiles qui ne peuvent être ciblées (El Chamaa, 1er décembre 2023).
« Life under Occupation, for over 70 years, has had a major impact on Palestinian libraries, their function within communities, and access to materials and resources that most libraries in other places around the world do not experience. » (Roberts, 2020, p.30)
Les bibliothèques existent en Palestine depuis l’Antiquité, mais ont vécu un cycle de destruction/reconstruction (Moore, 2021). Il existe des bibliothèques à la fois en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est. Le nombre total de bibliothèques en Palestine varie d’une source d’information à l’autre : un total de 101 bibliothèques selon la carte interactive des bibliothèques du monde (Fédération internationale des associations et institutions de bibliothèques [IFLA], s.d.); 295 selon la dernière étude majeure du gouvernement palestinien en 1996[1] (Danset, 2009) ; 300 en Cisjordanie et à Gaza selon Khader (2012). Au-delà des données quantitatives, on peut s’attarder plutôt à la diversité des types de bibliothèques existantes, qu’on peut diviser schématiquement en sept, même si certains types se recoupent : la bibliothèque nationale, les bibliothèques publiques/municipales, les bibliothèques universitaires, scolaires, familiales, celles d’ONG, de centres culturels ou spécialisés et enfin les bibliothèques religieuses (rattachées à des mosquées ou des églises).
Selon l’étude de 1996 du ministère de la Culture palestinien citée par Bergan (2000), quelques caractéristiques communes se retrouvent dans ces bibliothèques : des collections limitées, des espaces restreints, pas de système de catalogage électronique et peu d’équipement informatique. La majorité des employés seraient des hommes, qui n’ont pas été formés en bibliothéconomie/sciences de l’information.
- Bibliothèque nationale
« The Palestinian National Library is more significant than the state; it is the state of memory. […] A nation that does not have a national library does not exist. It is the mission of the National Library to preserve the cultural and intellectual heritage of the Palestinian people and to protect them from destruction, looting, demolition, and forgery ». (Issa Qaraqe, dans National Library of Palestine, s.d.b)
Le sujet de l’existence d’une bibliothèque nationale palestinienne illustre la complexité de la situation des bibliothèques en Palestine et le rôle politique et symbolique des bibliothèques nationales. Comme la Palestine n’est pas reconnue comme une nation pleine et entière par certains États dans la communauté internationale, on suppose que c’est la raison pour laquelle certains jugent qu’il n’y existe pas, de facto, de bibliothèque nationale (Roberts, 2020 ; IFLA, s.d.). Pourtant, et même si les informations à son sujet sont rares, il existe un site web de la bibliothèque nationale. On peut y lire que la Bibliothèque Nationale de Palestine est la « banque centrale » et la « plateforme » pour la « culture, l’identité et la mémoire du peuple palestinien » ; responsable de la collecte, conservation et promotion de la production intellectuelle et culturelle nationale sous toutes ses formes et à travers les périodes (National Library of Palestine, s.d.a). Le discours du directeur de la Bibliothèque nationale, Issa Qaraqe, reflète aussi l’engagement de la bibliothèque à contrer le « narratif sioniste » ; à être une « manifestation visible du patriotisme palestinien » ; un « outil de résistance » et « un symbole et un témoignage de la quête d’indépendance » (National Library of Palestine, s.d.b). Kamal (2023) explique que c’est en 2017 que le ministre de la Culture palestinien annonçait la décision du président de l’Autorité palestinienne de transformer un palais en cours de construction à Surda, près de Ramallah, initialement prévu pour devenir le siège officiel présidentiel, en une bibliothèque nationale. En 2019 un décret annonce la création de cette dernière, mais elle ne joue pas encore pleinement son rôle (Kamal, 2023). Enfin, la bibliothèque nationale israélienne contient aussi des collections sur l’histoire de la Palestine, considérées comme « propriété abandonnée » selon le gouvernement, alors même qu’elles ont fait l’objet d’un vol (Roberts, 2020). (Voir la section sur le cadre législatif)
- Bibliothèques publiques/municipales
Selon une étude du Bureau central palestinien des statistiques (2010) il y aurait 65 bibliothèques publiques dans les territoires palestiniens, dont 52 en Cisjordanie et 13 à Gaza (Toha, 2021). Les bibliothèques publiques ne sont pas nouvelles en Palestine (Khader, 2012). La bibliothèque de Naplouse (Nablus), en Cisjordanie, serait la plus grande bibliothèque publique en Palestine (Roberts, 2020). Son financement est limité et dépend des dons des universités. Elle possède une section pour enfants et organise des évènements mais ses collections sont restreintes. Elle dispose toutefois d’une section notable sur les prisonniers politiques (Roberts, 2020). Elle a un nombre important d’employé-e-s, de documents en arabe, de journaux palestiniens anciens et de documents légaux datant de la colonisation anglaise (Bergan, 2000). Toujours en Cisjordanie, la bibliothèque de Ramallah est une autre bibliothèque notable, avec un bâtiment de 3 étages de 900 m2, et 250 visites/jour mais seulement 5 employés (Bergan, 2000). La bibliothèque d’El Bireh a une taille similaire, dont une majorité de visiteurs étudiant-e-s (Bergan, 2000). Depuis 1967, c’est un lieu d’éducation et de transmission de la culture palestinienne et même de politisation. Elle organise des activités comme des séjours de cueillette d’olives (Roberts, 2020).
Du côté de Gaza, le 27 novembre 2023, il a été rapporté que la plus grande bibliothèque publique de Gaza a été détruite par un bombardement israélien (Sheehan, 2023 ; El Chamaa, 1er décembre 2023). L’institution était constituée d’une bibliothèque, d’un centre culturel et d’une bibliothèque pour enfants. Elle a été fondée en 1999 grâce à un financement de la Banque Mondiale et un accord de partenariat avec la ville de Dunkerque en France (El Chamaa, 1er décembre 2023).
Plusieurs auteur·ices et professionnel·les mentionnent également les bibliothèques Edward Said à Gaza, montrant la fluidité de l’organisation des bibliothèques en Palestine puisque ces bibliothèques ouvertes au public ont été constituées initialement par un individu privé, Mosab Abu Toha, un étudiant, après les bombardements de son université à l’été 2014. Les collections proviennent majoritairement des dons de l’étranger (Toha, 2021). Il existe d’autres bibliothèques publiques de tailles variées dans les grandes villes, par contre les bibliothèques municipales sont quasi-inexistantes dans les petites villes et villages (Bergan, 2000), à moins de projets de coopération internationale (Danset, 2009).
- Bibliothèques universitaires
La majorité des universités situées dans les territoires palestiniens occupés disposent de leurs propres bibliothèques pour faciliter la recherche et les études. En 2012, Khader évoque 49 établissements universitaires de niveau supérieur dans les territoires occupés (Gaza et en Cisjordanie).
La plus grande collection universitaire en Cisjordanie est celle des bibliothèques de la An-Najah National University dans la région de Naplouse, qui compte près de 600 000 volumes en plusieurs langues. An-Najah publie des revues académiques et des ressources électroniques en accès libre. Au moyen d’abonnements, ses bibliothèques offrent également l’accès à plus de 300 000 périodiques électroniques et revues scientifiques (An-Najah, 2019) et comptaient, en 2000, 22 employés (Bergan, 2000).
Connue pour son excellence académique et ses travaux de recherche à l’international, l’université de Birzeit à Ramallah est l’une des universités palestiniennes les plus renommées. Sa bibliothèque principale possède plus de 230 000 livres imprimés et se démarque surtout par sa collection numérique : plus de 430 000 livres et 63 bases de données. Elle a pu se doter d’un catalogue en ligne en 2011. Elle compte aussi une bibliothèque de droit, d’études des femmes et d’études en développement (Birzeit University, s.d.). À noter que la bibliothèque de Birzeit reçoit le soutien de l’Electronic Information for Libraries [EIFL], un organisme à but non lucratif qui travaille avec des bibliothèques en Palestine depuis 2005, pour permettre l’accès aux ressources académiques électroniques.
« In addition to opening our research to the world, our repository, named ‘FADA’ which means ‘Space’ in English, will facilitate learning for our local academics, researchers and students, who face problems meeting each other resulting from restrictions on movement. »
Diana Sayej Naser, Director of Birzeit University Main Library (EIFL, s.d.)
Créée en 1977, l’université Al-Quds est une université dont le campus principal est situé à Abou Dis, dans la région urbaine de Jérusalem et est muni de 6 campus au total (Bergan, 2000). Ses cinq bibliothèques, ayant plus de 113 volumes imprimés, incluent une bibliothèque médicale et une bibliothèque en études des médias (Al-Quds, s.d.).
Créée en 1991 par une ordonnance de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), l’Al-Quds Open Institution est un établissement d’enseignement supérieur public unique qui propose un enseignement autonome à distance. Y être inscrit permet l’accès à sa bibliothèque électronique, en plus de 20 succursales du réseau des bibliothèques universitaires dispersées en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. (QOU, s.d.) Gaza compte deux campus physiques, bombardés en novembre 2023 et actuellement occupés par l’armée d’Israël (QOU, 2023).
La bibliothèque de l’université islamique à Gaza, qui a 100 000 documents, est aussi ouverte au grand public avec des horaires séparés pour hommes et femmes (Bergan, 2000). Cette université a été bombardée en novembre 2023 et son site internet n’est plus en ligne (Middle East Monitor, 2023).
À l’extérieur de ces grandes bibliothèques universitaires, il existe d’autres bibliothèques mentionnées par les auteur·ices comme celle de Bethléem, bibliothèque de l’université financée par le pape, ou encore celle de l’université privée Falastin El Ahleyyah (Danset, 2009). En plus des enjeux de financement et de collections, les institutions éducatives telles que les universités et les bibliothèques, pépinières de la résistance, font l’objet d’attaques délibérées (Roberts, 2020).
- Bibliothèques scolaires
Nous manquons de données sur les écoles, mais un élément connu est le manque de moyens à la fois dans les écoles gouvernementales et d’ONG et donc pour les bibliothèques scolaires (Roberts, 2020 ; Khader, 2012 ; Kamal, 2023). Malgré une volonté de promouvoir la lecture, moins de 40 % des écoles publiques auraient une bibliothèque (Bergan, 2000 ; Khader, 2012). Une étude plus récente fait état de 23 % d’écoles qui n’auraient pas de bibliothèque (étude du ministère de l’Éducation, 2016-2017, citée par Kamal, 2023). Les bibliothèques scolaires les plus développées seraient dans les écoles privées, mais là encore il n’y a pas de portrait global (Bergan, 2000). On peut citer l’exemple de l’école Carmelite, école chrétienne privée, dont la bibliothèque organise des événements (clubs de lecture, etc.) (Roberts, 2020). Par ailleurs, les écoles situées dans les camps de réfugiés, gérées par l’UNRWA (l’agence des Nations Unis) ont des bibliothèques avec des employés et du budget, mais la population qu’elles desservent est énorme. Certaines bibliothèques scolaires jouent donc un rôle central pour leur école et d’autres écoles aux alentours, par exemple, Kalandiya Refugee camp, à Jérusalem (Bergan, 2000). Malgré des programmes financés à l’international, certaines bibliothèques ferment par manque de personnel et de fonds (Danset, 2009).
- Bibliothèques familiales
La Palestine se distingue par une tradition de bibliothèques familiales, assez répandues pour les familles aisées, et en général ouvertes au public. Certaines ont toutefois été confisquées par Israël et la majorité ne joue plus un rôle majeur aujourd’hui (Bergan, 2000). D’ailleurs, de nombreuses bibliothèques recensées comme bibliothèques publiques sont en réalité des bibliothèques privées, confessionnelles ou familiales (Danset, 2009). Les deux bibliothèques familiales, Khalidi et Ansari, situées à Jérusalem, sont les plus souvent nommées. La famille Khalidi était une famille d’avocats en droit islamique. La bibliothèque Khalidi, ou Khalidi Family Library, contient la plus grande collection privée de manuscrits arabes et islamiques dans les territoires palestiniens ; elle contient aussi des livres, des décrets datant de l’époque ottomane, des journaux et des documents personnels de la famille Khalidi ; et un bibliothécaire y est présent (Aslan, 24 juillet 2023). Elle se démarque par sa capacité à réunir l’épistémologie islamique et la modernité séculaire, et par sa longévité, puisqu’elle existe depuis 1900 (Moore, 2021). La bibliothèque Ansari, Ansari Public Library, a été fondée par Fahmi Al-Ansari et a des allures de bibliothèque publique, voire de bibliothèque nationale (Bergan, 2000). Elle contient des livres en arabe, des périodiques et des manuscrits rares (Bergan, 2000 ; Hamad, 2021).
- Bibliothèques d’ONG, de centres culturels et bibliothèques spécialisées
Les bibliothèques spécialisées sont une autre particularité de la Palestine : il s’agit de bibliothèques d’organisations, d’institutions et entreprises, très fréquentées, en particulier par l’élite intellectuelle palestinienne (Bergan, 2000). Il est difficile de toutes les recenser ; elles peuvent être confessionnelles, thématiques (femmes, droits de la personne, etc.), le plus souvent associatives, soutenues par des ONG étrangères (Danset, 2009).
Parmi les bibliothèques dans des centres culturels, on peut mentionner le Nashashibi Center for Culture and Literature, dans l’ancienne maison d’un intellectuel palestinien (Roberts, 2020) ou encore la bibliothèque du Qattan Center for the Child. Ouverte en 2004, elle offre des collections et services de pointe, avec du personnel et des moyens financés par la fondation Qattan, basée à Londres (Danset, 2009). Du côté des ONG, on peut citer la bibliothèque de la Société du Croissant rouge à Gaza et à Khan Yunis (Bergan, 2000). Le Seraj Library project, à l’initiative d’une ONG américaine en 2005, a permis la création de 10 bibliothèques communautaires et 2 centres communautaires dans les communautés rurales de Cisjordanie (Seraj Libraries, s.d.). Enfin, on peut citer des bibliothèques spécialisées comme les bibliothèques de prisons, qui sont importantes vu le nombre de Palestiniens détenus en Israël (Danset, 2009).
- Bibliothèques de mosquées et bibliothèques religieuses
Enfin, autre particularité de la Palestine, les bibliothèques de mosquées jouent un rôle historique en Palestine et dans les pays arabes. La mosquée était historiquement un des premiers lieux où l’on trouvait des livres et la lecture était encouragée par le prophète (Bergan, 2000 ; IFLA, 2009). Par exemple, la bibliothèque de la mosquée d’Al-Aqsa, est considérée comme l’une des bibliothèques les plus importantes à Jérusalem en raison de son statut religieux et scientifique (Hamad, 2021) ; elle abrite une collection unique de manuscrits arabes et 140 000 livres dans divers domaines (Bergan, 2000 ; Danset, 2009 ; Hamad, 2021). En plus des bibliothèques de mosquées, il y a quelques bibliothèques chrétiennes, qui appartiennent à des églises et des monastères à Jérusalem, par exemple la bibliothèque franciscaine, St Jacob, etc. (Hamad, 2021).
Obstacles et défis pour les bibliothèques en Palestine
De l’occupation britannique à l’établissement d’Israël et à l’occupation actuelle, «the most significant constraint upon Palestinian library culture has been a colonial continuum…» (Moore, 2021, p.16). Ce continuum colonial engendre plusieurs défis et obstacles.
- Insécurité et manque de protection : Les bibliothèques constituent des cibles en matière de destructions, confiscations, pillages (Khader, 2012), notamment en raison de leur rôle dans l’accès à l’information et la liberté d’expression (Hamilton et Bakken, 2007). Les destructions récentes en témoignent.
« When libraries are attacked, more than the horrific destruction of books is involved. Libraries are cultural repositories. They hold collective memory, preserve cultural heritage, showcase societal development and afford individuals the opportunity for learning and growth. » (Moustafa, 12 décembre 2023, s.p.)
- Censure et confiscation de livres et de collections : La censure est un enjeu majeur mis en évidence par la plupart des auteur·ices (Bergan, 2000 ; Roberts, 2020 ; Khader, 2012 ; Toha, 2021 ; Alayan, 2018). Même avec la fin du contrôle des bibliothèques dans les territoires palestiniens, Israël continue à contrôler les personnes et les biens qui sortent et entrent de ces territoires (Bergan, 2000). La censure sur les livres en lien avec l’histoire et l’identité palestinienne est particulièrement forte ; élimination de passages incluant des symboles palestiniens, destruction de chapitres de livres scolaires, etc. (Alayan, 2018). En plus de l’épisode majeur de vol de livres nationaux en 1948 (voir la section sur le cadre législatif), les checkpoints constituent des lieux clés de confiscation, par exemple pour les étudiant·es (Roberts, 2020 ; Danset, 2009), au point d’une « normalisation de la confiscation de livres » (Roberts, 2020). La censure peut aussi venir des autorités palestiniennes (Hamilton et Bakken, 2007), mais dans ce cas elle s’exerce plutôt en amont de la chaîne (auteur·ices, éditeur·ices, journalistes, autocensure) (Bergan, 2000). Enfin, il y a interdiction de livres provenant du Liban, pourtant une plaque tournante de l’édition pour le monde arabe (Roberts, 2020).
« People in Western democracies can and do create environments in which books rarely get banned today—something that Palestinians can only hope for. Censorship reigns supreme in Palestine. » (Toha, 2021, p.64)
- Limites aux déplacements (checkpoints) : Le territoire palestinien est divisé en trois avec des barrières visibles importantes (murs et checkpoints de l’armée israélienne). L’absence de liberté de mouvement empêche la coopération entre bibliothèques (ex. prêts inter-bibliothèques), l’acquisition de documents est retardée, etc. C’est aussi un obstacle pour les professionnel·les pour se former ou participer à des conférences (Danset, 2009 ; Roberts, 2020 ; Toha, 2021 ; Bergan, 2000 ; Khader, 2012 ; Hamilton et Bakken, 2007).
- Manque de ressources financières : Comme le souligne de multiples auteur·ices (Bergan, 2000 ; Roberts, 2020 ; Khader, 2012), les budgets des bibliothèques palestiniennes sont très limités et le financement de la culture peu priorisé dans un contexte d’occupation et de survie économique (Toha, 2021). Il y a une dépendance à l’aide internationale, même dans le cas de bibliothèques municipales (Bergan, 2000 ; Danset, 2009). Le manque de moyens entraîne l’incapacité à payer les bibliothécaires professionnel·les et une dépendance aux bénévoles (Danset, 2007).
- Difficile acquisition de matériel : Les ressources documentaires sont obsolètes et inadéquates, certaines sont très anciennes (Khader, 2012). Dans certaines villes, il n’y a pas de librairies ou celles-ci vivent des enjeux d’approvisionnement. Il faut aussi payer des frais de douane pour les achats à l’extérieur du pays (Danset, 2009). Même les dons subissent des délais et des frais de douane (Toha, 2021). Cela oblige certain·es bibliothécaires à passer par des canaux illégaux ou par l’achat de petites quantités reçues par la poste ou par les personnes qui viennent de l’étranger. En somme, « un livre neuf est un luxe » (Toha, 2021).
- Faible collaboration professionnelle : L’absence de formation universitaire spécialisée (Kamal, 2023), l’impossibilité de se rassembler, l’inexistence d’une structure associative ou institution centrale forte (Bergan, 2000 ; Khader 2012 ; Hamilton et Bakken, 2007) constituent des obstacles à la collaboration. Il n’y a aucune collaboration entre les bibliothèques palestiniennes et israéliennes (Hamilton et Bakken, 2007). Enfin, les ONG et les accords de coopération étrangers exercent des influences multiples et disparates (Danset, 2009). Peu de bibliothécaires étrangers vont en Palestine, renforçant l’isolement de la communauté professionnelle palestinienne (Roberts, 2020)
- Retard technologique : caractéristique des bibliothèques palestiniennes (Bergan, 2000 ; Khader, 2012) : seulement 16 % des bibliothèques publiques utiliseraient un système de classification, 69 % auraient des ordinateurs, mais environ un tiers seulement offriraient aux usagers l’accès à internet ou aux ordinateurs. Les enjeux d’accès à l’électricité et à l’internet limitent aussi la communication (Toha, 2021). Or le virage vers le numérique accentué par le contexte de pandémie renforce les menaces à l’accès en Palestine et au Moyen-Orient (Progressive Librarians Guild, 2021). Face à l’immensité des défis, pourtant, les bibliothèques continuent à jouer un rôle crucial en Palestine (Kamal, 2023).
« Les difficultés […] liées à la privation de liberté de circulation […] le chômage, la confiscation des terres […] la peur des incursions incessantes […] peuvent rendre totalement dérisoire un projet de développement des bibliothèques. Cependant la soif de savoir, […] l’excellent niveau de l’éducation primaire et secondaire, le grand nombre d’étudiants dans les universités, l’excellente maîtrise des NTIC font de ce développement un outil nécessaire et incontournable de l’accession à l’indépendance et au développement. » (Danset, 2009, p.73)
Cadre éducatif en sciences de l’information et des bibliothèques
Une formation adéquate en sciences de l’information a toujours fait défaut en Palestine, même si des initiatives ont été menées pour mettre en place une formation en bibliothéconomie grâce à un rapport du ministère palestinien de l’Enseignement supérieur il y a quelques années (Bergan,2000). Actuellement, aucune université n’offre de programme en bibliothéconomie en Palestine, que ce soit dans la bande de Gaza, ou en Cisjordanie. Bien qu’il soit difficile de recevoir une formation de niveau universitaire en bibliothéconomie, les bibliothécaires palestiniens eux-mêmes proposent souvent des ateliers et de petits programmes dans les collèges communautaires pour ceux qui ont besoin d’acquérir une formation plus poussée en bibliothéconomie (Badwan,2023). Les associations locales de bibliothécaires telles que la Palestinian Library and Information Consortium (PALICO) cherchent aussi à faire des bibliothèques universitaires des centres éducatifs ainsi qu’à développer le statut professionnel des bibliothécaires (Roberts, 2020). L’Association palestinienne des professionnels des bibliothèques et de l’information (APBI/PLIA) joue aussi un rôle majeur dans la formation des professionnels de l’information (Kamal, 2023).
Le rapport de Kuntz (2014) relève également que depuis la Nakba en 1948, en raison du vol et de la censure imposée par le gouvernement israélien, l’accessibilité de l’information au sein de la communauté arabe a été catastrophique, ce qui a entraîné un système éducatif sous-financé qui ne pouvait offrir que des options limitées sur les matières scientifiques traditionnelles. Comme en témoigne Randa Kamal, directrice de la bibliothèque de l’université Al-Quds à Jérusalem et présidente de l’Association palestinienne des bibliothèques et de l’information (PLIA), la majorité des bibliothécaires de la Palestine n’ont pas pu obtenir de diplôme professionnel en bibliothéconomie et il existe un manque de normes pour l’emploi des professionnel·les de l’information (Roberts, 2020).
Faute de formation professionnelle en bibliothéconomie en Palestine, la plupart des professionnel·les n’ont eu d’autre choix que d’aller à l’étranger pour suivre une formation appropriée en bibliothéconomie (Badwan, 2023). Cependant, selon le pays, la culture et la structure de la bibliothèque sont souvent différentes, ce qui rend encore plus difficile son adoption en Palestine où il n’existe pas de culture solide en matière de bibliothéconomie. La pénurie de formation en bibliothéconomie ne se limite pas aux nouveaux bibliothécaires, mais la situation difficile persiste au sein même des bibliothécaires professionnel·nes palestinien·nes. Comme en témoigne Eberhart (2016), les bibliothèques en Palestine ne disposent pas d’un budget suffisant pour permettre à leurs professionnels de recevoir une formation complémentaire. En raison du contrôle et de la confiscation des livres imposés par le gouvernement israélien, il y a aussi un manque de bons matériels d’apprentissage en arabe, détériorant encore davantage la situation déjà difficile de la formation en bibliothéconomie.
Associations de bibliothèques
En raison de son statut politique fragile et en dépit du fait que la Palestine a toujours été soumise à la répression d’Israël, la Palestine s’est efforcée de créer ses propres associations. La Palestinian Library and Information Association (PLIA, ou en français Association palestinienne des professionnels des bibliothèques et de l’information – APBI) a été l’une des premières initiatives fondées en 1960, mais elle a été interdite après la guerre des Six Jours de 1967, et ce n’est qu’en 1994 que la PLIA a pu être rétablie (Eberhart, 2016 ; Kamal, 2023). Basée à Ramallah, elle milite en faveur d’une meilleure reconnaissance du métier de bibliothécaire, mais elle ne peut pas communiquer facilement avec les sections régionales ni mener ses activités de façon adéquate, en raison des restrictions liées à l’occupation ; elle manque aussi de ressources financières. Ses membres sont divisés en deux catégories, les professionnel·les ayant un diplôme en bibliothéconomie et les membres qui n’en ont pas, bien que tous·tes travaillent en bibliothèque (Kamal, 2023).
Avec l’aide de certaines associations internationales telles que l’EIFL, des associations locales comme PALICO ont pu être créées pour répondre aux difficultés de la bibliothéconomie en Palestine, notamment en ce qui concerne les ressources électroniques (EIFL, s.d.). Nous avons également pu repérer des associations basées en dehors de la Palestine, telles que Middle East Librarian Association (MELA), qui défend aussi les droits à l’information du peuple palestinien. Comme l’État de Palestine n’a jamais été en mesure d’établir une structure adéquate et stable pour tous les aspects des bibliothèques, les associations de bibliothèques locales sont souvent sous-représentées dans la communauté mondiale. Des associations et des collectifs tels que Librarians and Archivists with Palestine (LAP) et Middle East Librarian Association, bien qu’elles n’aient pas été fondées ou qu’elles n’opèrent pas directement sur le sol palestinien, ont tenté de sensibiliser la communauté internationale à la situation désastreuse des bibliothèques en Palestine.
En 2023, le collectif LAP publiait une déclaration en soutien au combat palestinien pour l’autodétermination. Ils et elles rappellent le pouvoir des professionnel·les de l’information en matière de lutte contre la désinformation et la censure et pour renforcer la littératie médiatique (LAP, s.d.b). LAP a aussi lancé le projet Matoub, un site web qui permet de faire des dons de livres à la Palestine (Lynx, 2019). Depuis plusieurs années, la Social Responsibilities Round Table de l’American Library Association [ALA], est aussi très active concernant la situation des bibliothèques en Palestine. Elle répertorie sur sa page web des textes portant sur la question et elle publie la liste des résolutions qu’elle a soumises (et dont la majorité ont été refusées) au Conseil de l’American Library Association concernant la Palestine (SRRT, s.d.). L’IFLA a également organisé diverses missions en Israël et en Palestine et publié des recommandations (Hamilton et Bakken, 2007). PALICO et PLIA comptent actuellement parmi les rares associations qui peuvent encore opérer sur le sol palestinien, avec des membres issus des bibliothèques de Gaza et de Cisjordanie. En dépit de ces conditions difficiles, nous pouvons constater un développement au sein de ces associations, puisqu’elles se montrent capables d’organiser des séminaires, des ateliers et des réunions occasionnelles, par exemple des webinaires durant la pandémie, mais elles demeurent à petite échelle et ne sont pas en mesure de mener davantage d’activités (Bergan, 2000 ; Kamal, 2023).
Cadre législatif
Il est difficile, d’un point de vue extérieur, d’identifier des textes législatifs concernant les bibliothèques en Palestine. Parmi ceux qui ont pu être identifiés, il y a le décret du président Mahmoud Abbas du 5 juin 2019 qui établit la création de la Bibliothèque nationale palestinienne (National Library of Palestine, s.d.a). La Basic Law de 2003 (Geneva Center for Security Sector Governance [DCAF] 2023) garantit une multitude de droits et libertés aux citoyen·nes palestinien·nes. Elle ne contient toutefois rien par rapport aux bibliothèques ni par rapport à l’accès à l’information.
Quelques lois prévoient un droit d’accès à l’information : Press and Publication Law 9/1995; Environment Law 7/1999; Public Statistics Law 4/2000; Law on the Regulation of the Public Budget 7/1998; Law on the Financial and Administrative Oversight Bureau 15/2004; Law for the Election of Local Councils 10/2005; Elections Law 9/2005; Anti-Corruption (Amended) Law 1/2005. La plupart de ces lois ne répondent cependant pas pleinement aux normes internationales puisqu’elles abordent l’accès à l’information et la divulgation de l’information par l’État sans spécifier les moyens et procédures pour rendre publiques ces informations (Coalition for Accountability and Integrity [AMAN], 2013). Une ébauche de loi pour le droit à l’accès à l’information a été proposée, approuvée en 2005, mais n’a pu être officiellement adoptée avant la suspension du conseil législatif palestinien en 2007 (AMAN, 2013). La Palestinian Local Authorities Law No.1 of 1997 détermine quant à elle les domaines de responsabilité des municipalités. Les bibliothèques et les archives ne figurent cependant pas parmi les 27 domaines identifiés (Food and Agriculture Organization of the United Nations [FAO], 2022), ce qui pourrait expliquer la moins grande présence des bibliothèques municipales dans les petites villes. Un tel silence sur le sujet nous porte à croire qu’il n’y a pas de lois nationales officielles qui encadrent les bibliothèques, sinon peu qui soient accessibles. Cette impression est renforcée lorsque nous considérons que l’une des missions de la Bibliothèque nationale est de participer au développement de plusieurs lois, dont celle sur le fonctionnement de la bibliothèque nationale et une loi pour la protection du droit d’auteur (National Library of Palestine, s.d.b).
Pour comprendre la complexité de la situation des lois en Palestine, il faut d’abord comprendre l’impact législatif qu’ont eu les différents régimes qui ont gouverné la Palestine.
« Many generations of foreign control and occupation deprived the Palestinian people of the opportunity to develop their own functioning legal order. […] the Palestinians were subjected to a multiplicity of overlapping features from diverse foreign legal systems. » (Chodosh et Mayo, 1997, p.375)
En effet, depuis l’Empire ottoman jusqu’à l’instauration de l’Autorité palestinienne, chaque nouveau régime a modifié et complexifié le système légal en vigueur en le bonifiant de ses propres législations (Qafisheh, 2014). Dans le but de rendre invalides les ordonnances militaires imposées par Israël depuis 1967, Yasser Arafat, premier président de l’Autorité palestinienne, propose de rétablir l’ensemble éclectique de lois qui étaient en vigueur avant l’occupation israélienne. Cela a créé un cadre juridique composé de couches successives de régimes juridiques distincts et parfois en oppositions, s’appliquant différemment en fonction du lieu, du sujet et de la nationalité (Delacroix, 2014). Sans compter que la population palestinienne doit toujours composer avec les ordres militaires israéliens puisqu’Israël occupe une partie importante du territoire et possède un niveau de juridiction élevé dans certaines zones territoriales (Ludsin, 2005). C’est particulièrement le cas à Jérusalem-Est dû à son annexation par Israël en 1967. Par ailleurs, les Palestinien·nes actuellement en Cisjordanie sont soumis à la fois au système judiciaire militaire israélien et au système judiciaire palestinien qui ne sont pas totalement indépendants (Freedom House, 2023b). Virgina Tilley (2012) soulève par ailleurs la nature discriminatoire de cette double juridiction dans certains territoires palestiniens occupés :
« Israeli policy is to grant to Jewish settlers the protections of Israeli civil law and Basic Law, under the jurisdiction of Israeli civil courts, while administering Palestinians living in the same territory under military law and military courts whose procedures violate international standards for the administration of justice. » (p.78)
Depuis la séparation en deux administrations distinctes entre Gaza et la Cisjordanie (Qafisheh, 2014), aucune réélection n’a eu lieu après les 4 ans spécifiés dans l’Amendement de 2005 (DCAF, 2023) de la Basic Law. De même pour le Conseil Législatif palestinien pour lequel il n’y a pas eu de réélection depuis 2007 et qui n’a donc pu siéger et établir de nouvelles lois depuis (Freedom House, 2023a). Les seules nouvelles lois en vigueur proviennent de « laws-by-decree » provenant de décrets présidentiels (Freedom House, 2023b).
Cependant, comme illustré dans la section sur les obstacles et les défis, divers éléments externes ont aussi un impact sur le fonctionnement et le développement des bibliothèques palestiniennes. L’influence de l’occupation israélienne est parlante dans ce cas et est parfaitement illustrée par l’appropriation massive de livres à Jérusalem-Est qui s’est produite durant la Nakba en 1948. La guerre de 1948 a mené de nombreux Palestinien·nes natif·ves de la région à fuir et laisser dernière eux et elles leurs biens personnels. Livres, photographies, manuscrits et autres biens culturels ont été abandonnés et ainsi saisis par l’armée israélienne et envoyés, en majorité, à la Bibliothèque nationale et universitaire juive. Selon les témoignages recueillis, environ 30 000 livres ont ainsi été récupérés seulement dans cette région par le gouvernement israélien et ajoutés à la collection de la bibliothèque nationale juive (Amit, 2011 ; Kuntz, 2021). Bien que ce processus ait débuté comme un pillage des lieux sous l’effet de la Absentee Property Law (loi sur les biens des Palestinien·nes qui ont fui) de 1950, celui-ci s’est « légitimé » et fut organisé par le « Custodian of Absentee Property » (Hamad, 2021). Cette organisation aurait aussi amassé dans les années suivantes entre 40 000 et 50 000 livres de diverses villes, dont Jaffa, Haïfa, Tiberias et Nazareth (Amit, 2008). Ce ne sont toutefois pas que des livres qui ont été ainsi volés sous l’effet de la Absentee Property Law. D’autres matériels culturels importants ont été confisqués, dont des manuscrits rares provenant de la bibliothèque du Musée archéologique palestinien de Jérusalem (Kuntz, 2021). Bien que la Bibliothèque nationale d’Israël se présente d’abord comme la gardienne de biens qui aurait autrement été perdus, la réalité montre que ce patrimoine culturel n’est pas accessible aux principaux intéressés et aucun effort n’a été fait pour rendre les biens volés à leurs propriétaires originaux :
« In response to a question as to the reason why these libraries were not returned to their owners, the Israeli Justice Ministry told Agence France Presse that the task of presenting the evidence of ownership belongs to the original owner of the book, otherwise it will remain “abandoned property”. » (Hamad, 2021, p.12)
En effet, la possession de ces ressources par l’État d’Israël leur permet de garder un contrôle sur qui a accès ou non à l’information et ainsi plus facilement maintenir l’hégémonie sioniste :
« Israeli archive law restricts access to materials to fifty years from the date of creation but, even then, material deemed harmful to Israeli national security or foreign relations can be restricted indefinitely while archivists can choose which researchers have access to the materials. » (Sela, 2018, dans Kuntz, 2021).
Ceci démontre à la fois de grandes lacunes en ce qui concerne le cadre législatif offrant une protection au patrimoine culturel palestinien et les entraves de l’occupation israélienne sur le développement et le maintien du patrimoine culturel palestinien. Ce, même si Israël utilise des moyens d’oppression, de discrimination, de censure et d’entrave aux libertés des citoyen·nes palestinien·nes qui ne sont pas tous ouvertement des législations écrites :
« The breadth and consistency of such infringements suggest that they do not occur in isolation, but are part of a system that operates to control and dominate Palestinians in the occupied territory and to suppress any opposition to that domination. It bears noting that the web of relatively obscure and inaccessible military orders and regulations, combined with bureaucratic restrictions that are often racialized in implementation rather than on paper, makes the depth of Israel’s systemic discrimination less immediately conspicuous […] » (Dugard et Reynolds, 2013, p.897).
Information complémentaire et particularités
Les bibliothèques ont un rôle important à jouer dans la préservation de l’identité nationale et culturelle du peuple palestinien, en particulier dans le contexte actuel (Kamal, 2023 ; Qaraqa, 13 mars 2023). Elles constituent une forme de résistance à l’occupation (Roberts, 2020 ; Moore, 2021 ; National Library of Palestine, s.d.). Que ce soit par les efforts des individus, des collectifs, des associations ou des institutions, en Palestine et dans le monde, les bibliothèques et les bibliothécaires ont démontré récemment qu’elles ont un rôle à jouer dans la situation actuelle. Dans ce texte, à notre tour, nous ne pouvions pas passer sous silence l’occupation israélienne et ses impacts sur les bibliothèques, mais aussi le génocide en cours à Gaza (Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme [OHCHR], 2023). Nous ne pouvons pas être neutres, mais nous visons l’honnêteté intellectuelle (Lankes, 2018) ainsi que d’autres valeurs et compétences prônées par la profession telles que l’intégrité (Fédération des milieux documentaires [FMD], 2021) et la justice sociale (ALA, 2021).
Dans une perspective de justice sociale donc, les bibliothèques et les bibliothécaires à travers le monde peuvent soutenir les bibliothèques palestiniennes de diverses façons (Khader, 2012 ; Danset, 2009 ; LAP, s.d.b ; Roberts, 2020) : documenter et dénoncer la censure, les limites à la circulation des biens et des personnes, les destructions de bibliothèques ; mettre en œuvre et financer des projets structurants en lien avec les bibliothèques ; promouvoir des documents en arabe en accès libre ; renforcer la collaboration professionnelle et la solidarité internationale, etc. Bref, mettre nos compétences et notre statut à profit pour améliorer le sort des bibliothèques, mais aussi celui des Palestiniens et des Palestiniennes.
« It is the responsibility of all who believe in social justice for everyone to stand with the rights of the Palestinian people to receive what citizens from the neighboring countries are receiving with regard to library services. » (Khader, 2012, p.440)
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[1] Cette étude a été publiée en 1996 par le ministère de la culture de l’Autorité palestinienne, en arabe, et reprise par plusieurs auteur·ice·s dans les décennies subséquentes puisqu’il s’agit du seul portrait complet de la situation des bibliothèques.