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12 Pologne

(Marianne, Galina, Samia et Arielle)

Profil du pays

La Pologne est un État de l’Europe centrale, riverain de la mer Baltique et encadré au nord par la Russie (région de Kaliningrad), à l’est par la Biélorussie, au sud par la République Tchèque et par la Slovaquie, au sud-est par l’Ukraine, et enfin à l’ouest par l’Allemagne. La Pologne compte 38 millions d’habitants sur une superficie de 312 000 km2 (Kobierska-Maciuszko, 2013). Au cours du XVIII -ème siècle, cette nation est conquise par la langue française. Jusqu’à cette époque, le latin occupait une place prépondérante et par conséquent, servait de langue officielle. Dans la deuxième moitié du XVIIème siècle, c’est la cour de Pologne qui adopte totalement la langue de Molière. En 1645, tous les princes et toute la noblesse de la Cour parlent le français plus souvent et plus volontiers que leur propre langue.

L’apogée de l’influence française est atteinte avec le règne de Stanislas Auguste Poniatowski (1764-1795), alors que lui-même a fait son étude d’esthétique à Paris. Cependant, c’est également sous son règne que le français perdu progressivement son aura (Witt, 2005).

La société polonaise est très croyante, et essentiellement catholique. Bien que, selon une étude faite en 2014 par l’institut des statistiques de l’Église catholique, depuis dix ans, la communauté catholique en Pologne a perdu environ 2 millions de fidèles, « la Pologne reste toutefois le pays où le taux de catholiques, ou de ceux qui se déclarent comme tels, reste le plus élevé au monde, soit 92,2% » (Courrier international, 2014).

Histoire

L’histoire des bibliothèques polonaises ne date pas d’hier, surtout, l’histoire des plus anciennes bibliothèques comme celles des cathédrales de Gniezno (Gnesne) près de Poznań et du château royal de Wawel à Cracovie, qui remonte aux Xe et XIe siècles et à la naissance de l’État polonais. Jusqu’à la fin du XIVe siècle, les institutions ecclésiastiques furent les foyers de l’activité́ littéraire et intellectuelle. L’indépendance des centres des activités littéraire et intellectuelles vis-à-vis des structures de l’Église commence à voir le jour par, entre autres, la création de l’Académie de Cracovie (qui deviendra plus tard l’université de Jagellon). Cette Académie fut fondée par le roi Casimir le Grand, en 1364 et annonce, à cet effet, l’émergence de grands foyers de science et d’éducation. À la fin du XVe siècle, la bibliothèque de l’université de Jagellon, établie dès la création de l’université, possédait déjà quelques milliers de manuscrits et reflétait l’étendue du savoir et des connaissances humaines de l’époque.

Notons qu’au XVI e siècle, et particulièrement à Cracovie, la Pologne va connaître un essor spectaculaire de l’imprimerie.

Ainsi donc, la multiplication des imprimés a donné naissance à un impératif social et intellectuel de collecte, de conservation et de diffusion des ouvrages, bien que cela soit limité au cercle très restreint des gens lettrés (Kobierska-Maciuszko, 2013).

Une bibliothèque exceptionnelle (1747-1795)

Nous ne pourrions pas parler de l’histoire de la bibliothèque polonaise sans faire mention de la bibliothèque Załuski créée par deux frères au destin particulier. Cette bibliothèque a en quelque sorte démocratisé la connaissance. En effet, ces deux frères étaient des aristocrates ecclésiastiques, et hauts dignitaires de l’Église. Ils ont eu la brillante idée de fonder une institution entièrement démocratique et surtout étonnamment libérale. Ainsi, dans leur plan, par l’intermédiaire de leur bibliothèque, ils devaient mettre à la disposition de tou·te·s, et sans aucune censure, un savoir élitiste et qui était principalement réservé aux initiés.

Il faut signaler que les frères Załuski : Andrzej Stanisław Kostka (André, 1695-1758) et Józef Andrzej (Joseph, 1702-1774), étaient des amateurs de livres dès leur plus tendre jeunesse. Ainsi, lors de leurs séjours surtout à Paris, où ils allaient le plus clair du temps pour des raisons académiques, ils passaient bien du temps à visiter les bibliothèques et les librairies, ils achetaient des livres et des manuscrits. Le premier registre que Joseph a dressé en 1720, à l’âge de 18 ans, faisait état de 3000 livres. Un an plus tard, après la mort de l’oncle évêque, ils ont hérité d’un fond de livres important et d’une grande valeur auquel s’ajouta également, la collection d’un autre aïeul, le Primat Olszowski.

Lorsque Joseph fut nommé évêque de Płock, tout d’abord, il pensa fonder une bibliothèque publique dans son palais épiscopal. Mais finalement en 1723, les deux frères décidèrent d’adjoindre leurs propres collections à celles héritées de leurs aïeuls afin d’ouvrir une bibliothèque publique à Varsovie. En 1728, la bibliothèque Załuski possédait déjà environ 8 000 volumes venus de l’Europe toute entière.

Jusqu’à̀ nos jours, on n’estimera jamais, à sa vraie valeur, l’impact de la Bibliothèque Załuski dans la vie culturelle et scientifique polonaise. Elle a démocratisé la connaissance et a créé un véritable milieu intellectuel en regroupant autour d’elle non seulement des érudits mais aussi tous ceux qui étaient intéressés par l’histoire de la Pologne, sa littérature et sa culture (Witt, 2005).

Aujourd’hui, la Pologne compte environ 12 000 bibliothèques, toutes catégories confondues. Elles sont détentrices de plus de 150 millions de documents ; elles sont fréquentées chaque année par environ 8 millions d’usagers et emploient près de 70 000 personnes (professionnels qualifiés et autres effectifs) (Kobierska-Maciuszko, 2013).

Types de bibliothèques

Bibliothèque nationale

La Bibliothèque nationale de Pologne (Biblioteka Narodowa, BN) est située à Varsovie. Elle œuvre sous l’autorité du ministère de la Culture et du Patrimoine national du pays. Une première législation polonaise sur le dépôt légal, en 1780, a permis de constituer les premières bases de la collection nationale (Cornell, 2011). Cependant, suite aux revers de la Seconde Guerre mondiale où une grande partie des collections fut détruite, volée ou perdue, une nouvelle législation a été mise en place pour essayer de reconstituer la mémoire collective polonaise. La Loi sur le dépôt légal du 7 novembre 1996 et le Décret du 6 mars 1997 du ministre de la Culture et des Arts, modifié ultérieurement par le Décret du 24 mai 1999 (Cornell, 2011) façonnent la mission de la BN qui consiste à conserver toutes les œuvres publiées sur le territoire. La Bibliothèque nationale collecte également les publications étrangères en langue polonaise ou qui concernent le pays. Selon les législations mentionnées, la Bibliothèque nationale et la bibliothèque de Jagellonne reçoivent deux (2) copies de toutes les publications visées et l’une des deux bibliothèques se doit de les conserver indéfiniment (Cornell, 2011).

Histoire

La Bibliothèque nationale de Pologne tire son origine de la bibliothèque Załuski (première bibliothèque publique en Pologne). En 1794, suite à l’invasion russe, la bibliothèque Załuski fut transférée à Saint-Pétersbourg en tant que trophée de guerre. Elle s’intégrera à la Bibliothèque Impériale et par conséquent, assimilera la collection de cette dernière (Biblioteka Narodowa, s.d.). La Pologne retrouve son indépendance en 1918 et c’est le 24 février 1928 que le président de la République de Pologne, Ignacy Mościcki, convertit officiellement la bibliothèque Załuski en Bibliothèque nationale et lui attribue la mission de réunir la totalité de la production intellectuelle de la nation de même que les œuvres étrangères relatives à la Pologne (Lamure, 1971). À cette époque, les fonds de la Bibliothèque nationale comprenaient les collections de la bibliothèque Załuski, celles de la Bibliothèque Impériale russe, les collections d’autres bibliothèques basées à Varsovie et ceux d’importants aristocrates. Cependant, durant la Deuxième Guerre Mondiale, plus de 800 000 documents enregistrés furent complètement perdus (Biblioteka Narodowa, s.d.). En 1945, lors de la libération, la Bibliothèque nationale reprit ses activités en commençant par rassembler ses collections dispersées au Canada, en Allemagne et en Autriche. En 1977, elle s’est vu attribuer un nouvel espace physique et la construction d’un bâtiment conforme et répondant aux besoins architecturaux d’une bibliothèque nationale moderne commença. Elle fut terminée en 1991 (Kobierska-Maciuszko, 2013).

Fonds

Suite aux importantes pertes des collections durant la Seconde Guerre mondiale, la Bibliothèque nationale de Pologne a quand même réussi à reconstituer un fond plus qu’enviable grâce à la législation sur le dépôt légal (Cornell, 2011). Selon la loi du 7 novembre 1996 concernant les copies du dépôt légal, toutes publications polonaises doivent être envoyées en deux copies à la Bibliothèque nationale. L’une des deux copies est envoyée à la conservation, tandis que l’autre copie est envoyée à la circulation afin de permettre aux citoyens de la consulter. À ce jour, la Bibliothèque nationale reçoit annuellement plus de 190 000 publications (Biblioteka Narodowa, s.d.). 90% proviennent du dépôt légal, et 10% proviendrait de dons, d’achats ou d’échanges avec des partenaires tels que d’autres bibliothèques nationales ou étrangères. Selon le recensement de 2016, les fonds de la BN totaliseraient plus de 8 596 418 documents enregistrés (Biblioteka Narodowa, s.d.).

Les bibliothèques d’étude et de recherche

Les bibliothèques d’étude sont placées sous la tutelle du ministère de la Science et de l’Enseignement supérieur. Elles incluent les bibliothèques universitaires, les bibliothèques d’instituts, les bibliothèques de l’Académie des sciences et les bibliothèques d’écoles supérieures (Écoles polytechniques et Écoles d’agriculture) (Lamure, 1971).

En 2011, la Pologne comptabilisait 1200 bibliothèques d’étude et de recherche. Ces dernières se répartissent dans les 400 institutions d’enseignement supérieur qui incluent 126 établissements publics, dont 18 universités.  Environ 4.14% des budgets des universités étaient consacrés à leurs bibliothèques et environ 23.5% de ces fonds étaient dédiés aux développements des collections et des ressources électroniques (Kobierska-Maciuszko, 2013). Ces investissements ont permis une “révolution” en 1992 dans tout ce qui a trait à la modernisation des systèmes intégrés de gestion de bibliothèques (SIGB) et des infrastructures.  De ce fait, les bibliothèques d’étude et de recherche devancent les bibliothèques publiques en termes d’acquisition de fonds, de gestion des collections et d’accès à l’information.

À ce jour, une grande bibliothèque universitaire se démarque dans sa grandeur : la Bibliothèque Jagellonne. Cette dernière est considérée comme étant la deuxième bibliothèque nationale du pays. Il s’agit de la plus ancienne bibliothèque, mais également la plus riche. À l’instar de la Bibliothèque nationale, elle est soumise à la loi sur le dépôt légal et doit conserver deux exemplaires de tous les livres et périodiques polonais (Kobierska-Maciuszko, 2013). Afin de mieux départager la gestion des fonds, la BN se charge de conserver tous les livres polonais depuis 1800, tandis que la bibliothèque Jagellonne rassemble tous les livres jusqu’à 1800. De plus, elle se spécialise dans les domaines des lettres et des sciences et acquière tout ce qui a trait à la culture et la civilisation du Moyen Âge, de la Renaissance et de l’histoire des pays slaves et des pays du Midi de l’Europe (Tchécoslovaquie, Hongrie, Italie, etc.) (Lamure, 1971).

Bibliothèques scolaires

Une loi instaurée le 7 septembre 1991 sur le système éducatif imposait aux établissements scolaires d’avoir, dans leur enceinte, un centre de documentation pour les élèves afin de leur permettre d’avoir un accès facile et rapide aux outils répondant à leurs besoins d’apprentissage (Kobierska-Maciuszko, 2013). Cependant, la réalité en est toute autre. En effet, sur les 14 500 écoles primaires, 7 000 établissements secondaires de premier cycle et les 12 000 de deuxième cycle, il s’avère qu’il y a davantage d’écoles que de bibliothèques scolaires.

Une seule bibliothèque scolaire peut se retrouver à desservir plusieurs établissements (Drzewiecki et Grabowska, 2011). Cela serait principalement dû au manque de ressources humaines dont les formations ne concordent pas aux conditions de travail de leurs corps de métiers. De ce fait, le réseau des bibliothèques scolaires compense cela en coopérant avec les bibliothèques pédagogiques dont la mission s’articule autour du corps enseignant.  Le service aux élèves s’en retrouve inclus. En 2011, un recensement a démontré qu’il existe 350 bibliothèques pédagogiques qui sont essentiellement basées dans les capitales régionales (Drzewiecki et Grabowska, 2011).

Bibliothèques publiques

Le décret sur les bibliothèques et la protection des collections du 17 avril 1946 signale le début du rétablissement du réseau de bibliothèques publiques en Pologne durant la période de l’après-guerre. En octroyant à chaque bibliothèque et à son fond, toutes catégories confondues, le statut de bien culturel sous l’autorité de l’État, le décret assure un financement permettant le fonctionnement et le développement de toutes les bibliothèques du pays (Kobierska-Maciuszko, 2013). Divers programmes de subvention destinés à la modernisation des infrastructures et à l’achat d’équipement spécialisé sont mis en place à la fin des années 2000 afin de rehausser le standard des bibliothèques publiques et d’augmenter le lectorat. En effet, la Pologne, depuis sa sortie du bloc soviétique en 1989, avait connu une baisse significative de la fréquentation en bibliothèque publique (Środa-Murawska, 2020). Le nombre de bibliothèques publiques, entre 1995 et 2006, était ainsi passé de 9 500 établissements à 8 500, alors qu’en parallèle, le nombre de points de service chutait de 4 400 à un maigre 1 700 (Gorny, 2009). Aujourd’hui placé sous la responsabilité du ministère de la Culture et du Patrimoine national, le réseau des bibliothèques publiques est supervisé dans son ensemble par la Bibliothèque nationale (Biblioteka Narodowa, BN). Néanmoins, chacune des seize voïvodies (régions administratives) composant le pays est, à toutes fins pratiques, responsable de la gestion administrative et financière des bibliothèques de son territoire. Seize bibliothèques régionales principales, encadrées par la BN, assurent ainsi le service dans leurs régions respectives grâce à un réseau de bibliothèques locales (Kobierska-Maciuszko, 2013). D’après les données disponibles auprès de l’IFLA, la Pologne comptait, en 2020, 7 782 installations de bibliothèques publiques (IFLA, s.d.).

Parmi ce réseau, l’une des installations les plus importantes est sans conteste la Bibliothèque publique principale de Varsovie, communément surnommée «Koszykowa» d’après le nom de la rue où elle se trouve. Fruit d’une initiative publique, cette bibliothèque fondée en 1907 possède l’une des plus grandes collections de Pologne (environ 1,5 million de documents) malgré la perte de près de 80% de ses collections durant la guerre. Occupant la double fonction de bibliothèque régionale et municipale, la bibliothèque de Varsovie assure aussi certaines fonctions généralement liées aux bibliothèques de recherche : édition de publications (dont la revue mensuelle Bibliotekarz), organisation de conférences, élaboration de partenariats avec des organismes culturels et scientifiques, etc. (Biblioteka Publiczna m.st. Warszawy, s.d.). À Rumia, une ville-dortoir située en banlieue de Gdańsk, un projet de modernisation d’une station de train incluant l’ajout d’un espace de bibliothèque publique a connu un succès retentissant en 2014. Récipiendaire du prix Single Space Project de la Library Interior Design Awards de l’ALA/IIDA en 2016, la Culture Station Library (Stacja Kultura) offre un espace de bibliothèque aménagé de manière à évoquer l’univers ferroviaire. Suite à cette réussite, d’autres projets d’adaptation de bâtiments vétustes ont ainsi permis la création de nouvelles bibliothèques publiques dans plusieurs villes, notamment à Skolimów (ancien bureau de poste), Łódź (ancienne centrale électrique) et Mikołów (ancien cinéma) (Środa-Murawska, 2020).

Cadre éducatif en sciences de l’information et des bibliothèques

Le fulgurant développement observé en sciences et en techniques, combiné à la démocratisation de l’instruction et de la culture, ont engendré le besoin d’accroître le nombre des bibliothèques et des services d’information. Cette réalité s’accompagne alors d’un développement progressif de la bibliothéconomie qui tend à se spécialiser et en tissant, dans le même temps, davantage de relations avec d’autres disciplines. Le ou la bibliothécaire d’aujourd’hui est donc obligé·e de se perfectionner continuellement afin de suivre le rythme de changement qui s’opère au sein de sa discipline. Pour revoir alors la formation d’un·e bibliothécaire moderne, deux problématiques s’imposent : il s’agit de savoir si le ou la diplômé·e d’une école de bibliothécaires doit avoir une formation polyvalente lui permettant de travailler dans n’importe quelle bibliothèque ou centre d’information, ou si un·e diplômé·e d’une école de bibliothécaires doit juste être spécialiste d’une catégorie de bibliothèques, les bibliothèques scolaires en l’occurrence.

Formation au secondaire et son évolution

Il y a une formation de deux ans, à la suite de l’enseignement secondaire général. Le but de ces deux années de formation à orientation bibliothéconomique est d’élargir les connaissances générales et d’assurer la formation professionnelle des finissant·e·s. Un programme similaire est dispensé au Centre national de formation des bibliothécaires à Jarocin. Le diplôme délivré par ces écoles donne accès à la deuxième année d’études supérieures par correspondance, à condition de satisfaire à un contrôle des connaissances. Toutefois, il faut souligner que ce diplôme permet d’accéder à la deuxième année d’étude supérieure en bibliothéconomie seulement. Les ancien·ne·s élèves des écoles secondaires travaillant dans des bibliothèques peuvent acquérir des qualifications professionnelles supplémentaires au Centre de formation permanente des bibliothécaires qui s’occupe de l’enseignement par correspondance (Kubow, 1984).

Formation supérieure et son évolution

Aujourd’hui, les études supérieures en bibliothéconomie sont les plus répandues auprès des futur·e·s apprenant·e·s. Elles sont offertes dans 15 universités ou écoles supérieures de pédagogie. Jusqu’à une date récente, les études duraient 4 ans et étaient sanctionnées par une licence en bibliothéconomie et science de l’information (équivalent du Baccalauréat universitaire au Québec). Actuellement, les études en bibliothéconomie durent 5 ans et ceci, à la suite de débats entre bibliothécaires et enseignant·e·s. En prolongeant le cursus, le but n’était pas d’augmenter le volume des connaissances théoriques et pratiques, mais plutôt de favoriser leur approfondissement. Sur le terrain, cette orientation a fait ses preuves et s’avère également bien adaptée à la mise en place de cursus de spécialisation pour les diplômé·e·s.

Maintenant, les établissements d’enseignement supérieur ont une plus grande autonomie dans la définition de leurs programmes d’études; 60 % des contenus sont fixés par l’administration centrale et 40 % sont laissés à l’initiative des écoles elles-mêmes.

Aujourd’hui, le profil de la formation des bibliothécaires polonais·e·s est en grande partie lié à la direction dans laquelle se développe la science du livre et des bibliothèques. En clair, les études théoriques sont intrinsèquement basées sur la vision globale du livre, depuis sa fabrication jusqu’à sa consommation. Ce qui explique le fait que les diplômé·e·s d’aujourd’hui disposent certes de connaissances théoriques d’éléments probants pour une étude scientifique de l’histoire du livre et des bibliothèques, mais ne sont pas suffisamment outillé·e·s sur la multiplicité des problèmes de la bibliothéconomie contemporaine.

Dans ce contexte, il a été décidé de faire profiter aux écoles de bibliothécaires les services de professionnel·le·s expérimenté·e·s, de faire faire aux enseignant·e·s des stages dans les meilleures bibliothèques en Pologne et à l’étranger, d’élever le niveau des stages professionnels dans les bibliothèques puis d’exiger davantage de collaborations entre les bibliothèques et les écoles et enfin de bien équiper les écoles en matériels et en instruments didactiques (Kubow, 1984).

Association de bibliothèques

Association des bibliothécaires polonais – Stowarzyszenie Bibliotekarzy Polskich

L’Association des bibliothécaires polonais (Stowarzyszenie Bibliotekarzy Polskich, SBP) dénombre environ 8 500 membres dans l’ensemble du pays. Cette organisation sans but lucratif représente des chercheurs et des professionnel·le·s de l’information travaillant dans tous les types de bibliothèques (Kobierska-Maciuszko, 2013). C’est à partir de la Commission for the History of Books and Library Knowledge, une initiative fondée en 1915 à Varsovie, que se forme la base de ce qui deviendra, en 1917, l’Association des bibliothécaires polonais·e·s. À cette époque, l’association travaille surtout à supporter le développement de nouvelles bibliothèques et à promouvoir la lecture. Fait important, la SBP est l’un des membres d’origine supportant la formation, en 1927, de l’International Federation of Library Associations and Institutions (IFLA). Entre 1939 et 1944, durant l’occupation de la Pologne, la SBP est forcée d’opérer en secret afin de tenter de protéger les installations de bibliothèques et leurs collections des ravages de la guerre. L’organisation adopte sa forme actuelle en 1953, et rejoint, au fil du temps, les rangs de multiples associations internationales. Aujourd’hui, la SBP a comme vocation les enjeux, débats et intérêts liés au domaine de la bibliothéconomie en Pologne. Les objectifs au cœur de sa mission sont la reconnaissance des métiers liés aux sciences de l’information, l’intégration des professionnel·e·s auprès des communautés desservies ainsi que le développement des bibliothèques en lien avec l’évolution de la société de la connaissance (Stowarzyszenie Bibliotekarzy Polskich, s.d.). L’organisation est divisée selon les seize régions administratives du pays, mais elle s’articule aussi autour de différentes sections et commissions thématiques : préservation et conservation des collections, marketing et gestion des bibliothèques, publics à mobilité réduite, automatisation et nouvelles technologies, etc. (Kobierska-Maciuszko, 2013).

Partenariats

Au niveau du développement du réseau des bibliothèques publiques, la Pologne profite depuis 2008 d’une contribution considérable sous la forme d’un partenariat avec la Polish-American Freedom Foundation (PAFW). Le Library Development Program (LDP), supporté jusqu’en 2015 par la Bill and Melinda Gates Foundation, a entre autres permis l’acquisition de matériel informatique ainsi que l’implantation de programmes de formation additionnels pour les employés du secteur des bibliothèques. Jusqu’à aujourd’hui, ce sont 4 055 bibliothèques qui ont pu bénéficier du support offert par le projet grâce à la Foundation for the Development of the Information Society (Fundacja Rozwoju Społeczeństwa Informacyjnego, FRSI), l’organisme polonais créé afin d’assurer la gestion du projet (Polish-American Freedom Foundation, s.d.).  Autre initiative majeure, la collection « Patrimoines Partagés », un projet lancé en 2017 par la Bibliothèque nationale de France (BNF), a donné lieu à un partenariat important avec la Bibliothèque nationale de Pologne (Biblioteka Narodowa, BN). Ce projet, ayant pour but de souligner les liens unissant l’histoire française à celle d’autres pays, permet la diffusion de fonds complémentaires par l’entremise de Gallica, la plateforme de la bibliothèque numérique de la BNF. La collection est présentement composée de sept bibliothèques numériques distinctes dont la bibliothèque France-Pologne. Cette bibliothèque collaborative, présentée sous forme bilingue (français/polonais), est majoritairement consacrée à la période allant de la Renaissance à la Seconde Guerre mondiale (Bibliothèque nationale de France, s.d.).

Cadre législatif

Les bibliothèques sont régies par la Loi sur les bibliothèques datant du 27 juin 1997. Le règlement précisant les principes généraux de fonctionnement des bibliothèques est couvert dans les articles 1 à 6. Voici quelques-uns de ces principes : les dispositions appliquées aux activités culturelles sont applicables aux bibliothèques lorsque la loi ne statue pas sur une situation en particulier, les missions fondamentales des bibliothèques sont la collecte, le traitement, le stockage et la protection des documents de la bibliothèque, le droit d’utilisation des bibliothèques est universel conformément à la loi polonaise.

L’article 7 évoque le rôle du Conseil national des bibliothèques. Sous la tutelle du ministère de la Culture et de l’art, le Conseil veille à émettre des avis sur les actes juridiques concernant les bibliothèques, coordonner les projets de bibliothèques au niveau national, encourager le développement de la bibliothéconomie, évaluer les activités et les politiques des bibliothèques.

L’organisation des bibliothèques est relatée dans les articles 8 à 14. Les conditions de fonctionnement des bibliothèques sont gérées par les ministres, les chefs des bureaux centraux et les unités de gouvernement local. Les services de bibliothèque sont généralement gratuits. Dans certains cas, des frais peuvent être exigés, par exemple les services de prêt entre bibliothèques et la location de matériel audiovisuel peuvent être payant, tout comme les retards de restitution de documents empruntés.

La réglementation spécifique à la bibliothèque nationale, aux bibliothèques publiques, de recherche, scolaires et pédagogiques sont traitées dans les articles 16 à 22.

Les articles 23 et 24 couvrent la réglementation des bibliothèques professionnelles et d’entreprise. Les premières sont destinées à soutenir les tâches de travail et le développement professionnel des personnes employées. Les secondes sont dédiées au développement éducatif et culturel des personnes employées et de leurs familles.

Les articles 25 et 26 couvrent la prise en charge des groupes d’utilisateur·trice·s ayant des besoins spécifiques comme les personnes non-voyantes, détenues, personnes mineures en refuge, personnes en foyers sociaux, etc. Les bibliothèques publiques coopèrent afin d’assurer les activités pour ces groupes.

Le réseau de bibliothèques est régi par les articles 27 et 28 dont l’information est couverte à la section “Types de bibliothèques”.

L’article 29 relate les exigences en matière de qualifications professionnelles pour travailler en bibliothèque. Ces qualifications sont déterminées par le ministre de la Culture et de l’art en concertation avec les ministres compétents. Les bibliothécaires doivent avoir des qualifications de bibliothécaires et forment un groupe professionnel de bibliothécaires. Les appellations des postes d’emploi peuvent être les suivantes : bibliothécaire, bibliothécaire junior, principal·e, gardien·ne, gardien·ne principal·e, bibliothécaire certifié·e (assistant·e, professeur·e adjoint·e, conservateur·trice certifié·e, conservateur·trice certifié·e principal·e).

Information complémentaire/particularités

Entre mars et mai 1961, à la fin de son voyage d’études en Pologne, Frédérique Rawicz, bibliothécaire à la bibliothèque Sainte-Geneviève (France), a rédigé un rapport dans lequel figurait l’Institut de bibliographie de Pologne (IBP). Ce dernier était une section de la Bibliothèque nationale de Varsovie créé en 1928. L’IBP se spécialisait dans la résolution des problèmes liés aux bibliographies. Après la dissolution de l’Institut national du livre de la ville de Łódź en 1949, l’IBP accueilli toutes ses collections de livres bibliographiques pour les mettre à la disposition des personnes employées de la Bibliothèque nationale et au service de la recherche. L’institut fut renommé par la suite en Centre national de bibliographie. Il était constitué de 5 services et de 3 sections. Les services étaient les suivants : service de théorie et d’organisation bibliographiques (théorie, organisation et publication), service de bibliographie rétrospective (ouvrages retraçant l’évolution des productions bibliographiques de la Pologne à travers l’Histoire), service de bibliographie courante générale (répertoires des ouvrages, brochures, cartes et plans, estampes, partitions de musique reçus par dépôt légal), service de bibliographie courante spéciale (répertoires des périodiques de tout genre), service de bibliographie des ouvrages recommandés (rédaction de fiches descriptives des ouvrages destinées aux différentes bibliothèques et impression de bibliographies recommandées portant sur un sujet spécifique). Les sections étaient les suivantes : section de documentation bibliothéconomique (catalogues collectifs de bibliothéconomie et d’archives bibliothéconomiques), section de fiches imprimées (les fiches sont gratuites et destinées aux bibliothèques scientifiques et publique), section de statistique de l’édition (statistiques générales des publications périodiques et non périodiques) (Rawicz, 1961).

Références

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Biblioteka Publiczna m.st. Warszawy – Biblioteka Główna Województwa Mazowieckiego. (s. d.). The library now and then. https://www.koszykowa.pl/dla-czytelnikow/o-bibliotece/biblioteka-teraz-i-kiedys

Bibliothèque nationale de France. (s. d.). France-Pologne. BNF. https://www.bnf.fr/fr/france-pologne

Cornell, M. (2011). La Bibliothèque nationale de la Pologne: le dépôt légal et la protection par le droit d’auteur à l’ère numérique. Cahiers de la propriété intellectuelle. Vol.23, no 01. https://www.lescpi.ca/s/937

Drzewiecki, M. et Grabowska, D. (2011). School Libraries and the Social Changes in Poland after 1989. Polish Libraries Today, vol. 8, p.30-37.

Gorny, M. (2009). From the old-fashioned library to the public library: Changes in the cultural functions of Polish academic libraries. Dans W. Graves, J.M. Nyce, J. Golden et D.E. Williams (dir.), Advances in Library Administration and Organization (vol. 27, p. 109-122). Emerald Group Publishing Limited. https://doi.org/10.1108/S0732-0671(2009)0000027011

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Kobierska-Maciuszko, E. (2013). Les bibliothèques en Pologne. Dans : Frédéric Blin éd., Les bibliothèques en Europe: Organisation, projets, perspectives (pp. 141-153). Paris: Éditions du Cercle de la Librairie. https://doi.org/10.3917/elec.blin.2013.01.0141

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